La vie et toutes ces sortes de choses

lundi 26 septembre 2016

C'est long, la rentrée

Alors il y a eu la phase vertiges, on va dire que c'est en voie de résolution, peu ou prou.

Il y a les enfants qui reprennent leur rythme. Ça va environ tout seul pour l'une, moins pour l'autre qui, entre sa mère à la maison pendant une semaine puis son père qui reprend le chemin du boulot trouve que c'est bizarre et moins marrant que tout le monde en même temps dans la piscine (je ne lui donne pas tort).

Et puis les retrouvailles avec la halte-jeux et son lot de microbes et autres virus.

On voit qu'on gagne un peu de résistance immunitaire, il a mis trois énormes semaines à attraper son premier rhume. Très costaud, le rhume, vu qu'il nous l'a gentiment distribué.

Nous voici donc épuisés par nos rentrées, les réveils à 6h15, les microbes, à gérer le rhume d'homme d'un bébé de deux ans tyrannique.

On aura pas fini de la digérer, cette rentrée, que ça sera déjà la Toussaint, j'ai l'impression.

Bref. C'est l'heure d'aller bosser.

mercredi 21 septembre 2016

Comment Noé a mangé le sandwich du SDF

L'autre jour, j'avais rendez-vous chez l'ORL-qui-m'a-dit-que-tout-va-bien à l'heure du déjeuner.

Mon Enchanteur m'y a gentiment accompagnée, et comme j'avais pris l'après-midi en congé, nous avions prévu de rendre visite à une amie après.

Entre les deux, une urgence, se nourrir, et plutôt vite.

Nous voilà donc, guillerets et rassurés, un peu affamés aussi, devant le McDonalds[1] de la gare de la ville où nous étions.

Devant le dit fast-food, un monsieur me demande une pièce. Que je n'avais pas, comme souvent, j'ai rarement de la monnaie sur moi. Il me demande alors si je peux lui payer un sandwich alors j'ai dit oui, et même un menu, on est entrés.

Mais maintenant chez Mc Do il faut commander sur une borne ! Or, ma connaissance des menus est si faible que je me retrouve comme une poule qui a trouvé des bretelles. Je propose donc au monsieur de choisir ce qu'il veut. Il cafouille lui-même un peu, mais au final, nous voici partis dans la (longue) attente de nos menus. A table. Je crois que je ne vais pas me remettre du fait d'aller au Mc Do et d'attendre qu'on me serve à table.

Quoi qu'il en soit, voici nos plateaux. Avec mon menu, celui de l'enchanteur, celui du monsieur et un burger de plus. Je me dis que bah, il doit avoir faim.

Pas du tout, il constate la présence d'un sandwich en trop !

J'ai donc trouvé la deuxième personne du secteur après moi inapte à se servir d'une borne.

On a échangé quelques politesses sur qui mangerait le sandwich, je lui ai proposé de l'emporter, il a refusé poliment. Et du coup après son menu, c'est Noé qui a mangé le sandwich (commandé en trop) du SDF. Le vil !

Quoi qu'il en soit c'était un de ces moments où la conscience du privilège est forte. J'étais contente de servir à quelque chose ce jour là et me suis sentie très maladroite. En lui proposant de s'assoir avec nous (je me disais qu'il devait se faire lourder plus souvent qu'à son tour et que manger assis, c'est plus cool, mais ça se trouve il n'avait pas envie, ou ça le gênait et il n'a pas osé refuser), en ne trouvant pas de sujet de conversation sans me dire que j'allais l'embarrasser avec un air de Bécassine Béate qui descend de son petit nuage rose.

Bref.

On était côte à côte dans des mondes violemment distincts. Je ne suis pas sûre que ça soit le monde de mes rêves.

Note

[1] C'est un truc un peu particulier, je n'aime pas le Mc Do, mais une fois par an je suis prise d'une envie dévorante d'un menu chez eux. J'en sors déçue et mal nourrie et le cycle repart pour un tour.

vendredi 22 juillet 2016

Avec et sans eux

Il a deux ans. Chaque contrariété (aussi minime nous semble-t-elle, mais notre point de vue est singulièrement différent) génère un piaillement suraigu.

Il a un niveau de patience inférieur à zéro, a besoin d'un public 95 % du temps et nous mange toute la ressource disponible.

Il fait une expérimentation périlleuse par tranche de dix minutes et est une sorte de test de résistance cardiaque à lui tout seul.

Mais quand je ne le vois pas ses tendresses et ses drôleries me manquent, ses mots de plus en plus assurés, ses phrases, ses rires.

Le vide qu'il laisse (en dormant dans la pièce d'à côté) est plus grand que le trop-plein qu'on éprouve parfois à l'endurer toute la journée.

Elle a dix ans. Et une vie gâtée mais pas forcément simple. C'est une diva, une attachiante, une beauté reloue, une angoissée tendre, un peu aussi.

Quand elle n'est pas là, la qualité du silence surprend. C'est caaaaalllme. Et puis on peut reprendre possession de notre lit, de notre télé, qu'elle squatte allègrement.

Il y a moins de bouderies mais moins de câlins.

Ils sont venus déjeuner avec moi ce midi et je l'ai laissée en larmes parce qu'on ne va pas se voir pendant deux semaines. Ma fille, cette dure à cuire qui, pendant qu'on regardait Le voyage d'Arlo me disait qu'on est pas non plus obligée de faire étalage de ses émotions (alors que je pleurais à gros bouillons).

"Je te préfèèèèèèèèèreuuuh" sanglotait-elle dans mes bras.

Alors quoi ? Tension passagère avec son père, effet "jeunes mariés" chez lui qui la gonfle ? Coup de blues très passage, les hormones Simone qui travaillent sa sensibilité ? Un petit manque de sommeil ou une des grandes décisions magistrales dont elle a le secret ?

J'espère avoir le temps de la voir un peu ce soir pour essayer d'en savoir plus.

Le vide qu'elle laisse est plus grand que l'espace qu'elle sur-occupe.

Avec eux, c'est épuisant, exigeant, difficile (mais aussi riche, drôle, vibrant d'amour, stimulant).

Sans eux, c'est plus reposant, c'est sûr.

Mais je préfère avec, tant, tellement.

(Bon, sauf peut-être pour un week-end once in a while, hein)

lundi 20 juin 2016

La valse

La semaine dernière, Lomalarchovitch a eu un truc qui ressemble suffisamment à une roséole pour qu'on se dise qu'il a probablement eu la roséole.

Bref, bébé un peu (un peu !) abattu, puis tacheté de rose mais sans appétit (SANS APPÉTIT !!). Puis bébé remis et hop, c'est reparti.

Vendredi soir, Cro-Mignonne avait froid. Un truc qui lui arrive une fois par an, et encore, les années bissextiles uniquement. La voici enroulée dans le plaid-doudou au bout de mon lit, je parlais avec mes parents au téléphone quand soudain, je réalise qu'elle s'est endormie (ENDORMIE !!!).

Le truc qui ne lui est pas arrivé depuis ses 5 ans et demi, quelque chose comme ça.

De fait, elle avait la chair de poule et plus de 38,5° de fièvre. On a annulé la pyjama party du lendemain et on a bien fait, ça a duré 36 heures comme ça sans autre symptôme qu'un mal de gorge fugace.

Et puis dimanche matin elle était remise et hop, c'est reparti.

Je l'ai rendue vaillante et en bon état (j'espère) à son père hier soir, et puis en faisant des bisous à son petit frère on l'a trouvé un peu chaud. Oui, il l'était un peu mais rien de méchant. Jusqu'à ce que ça grimpe et que finalement 38,3° et pas d'autre symptôme.

Ce matin c'était 38,5°, rieur et actif mais un peu branlant sur ses jambes quand même.

Comment vous dire ?

Un peu marre de la valse du Doliprane, là, tout de suite.

(Mais : que de câlins quand les enfants sont malades, oh oui oh oui !!)

vendredi 10 juin 2016

Colombes, quartiers abandonnés

Nous sommes donc un matin de juin 2016. Aux Fossés-Jean, quartier (très) populaire de Colombes.

J'ai croisé la directrice de l'école de ma fille, alors qu'elle sortait de sa voiture et que j'allais chercher la mienne. On échange trois mots, elle me dit que c'est compliqué, à l'école, qu'il y a une poignée de gamins incontrôlables qui perturbent les classes. Qu'on ne peut pas faire grand chose, qu'on a pas prise sur eux.

De fait, ce n'est pas la première fois qu'on constate la très faible implication des parents dans l'école : galères répétées pour trouver des parents accompagnateurs, une volontaire (sur 120 familles) pour organiser la fête de l'école... pour la partie la plus agréable. Mais aussi : parents ignorant les mots dans le carnet, les rendez-vous, ou alors ils viennent pour insulter la directrice, l'enseignant. Ou font oui oui de la tête mais semblent perdus.

"On a plus de mixité", me dit la directrice. Les familles les moins pauvres partent du quartier.

Faut dire, faut avoir un certain sens militant pour mettre ses enfants dans cette école dont les bâtiments se disloquent.

La municipalité nous répond, inlassablement "il y a 38 écoles à Colombes". Et il faut bien un dernier sur la liste, position que nous tenons fièrement depuis des années.

La municipalité argue que grâce à elle, les travaux de rénovation du quartier démarrent. La précédente dirait que c'est grâce à leur travail, la précédente que...

En attendant les équipements diminuent, les familles fuient, la misère sociale s'installe.

Qu'avons-nous fait pour en arriver là ? Nos politiques urbaines, sociales, montrent des limites, ça craque de partout.

Et la prise de conscience ? Niveau municipal, c'est à pleurer. Nous sommes la ville où, si un enfant vient à la cantine sans avoir été inscrit, il y a une pénalité. Jusque là, pourquoi pas ? Prix unique, 5 euros. Plus cher, donc, que le prix d'un repas (j'ai un QF de 6 et je dois payer un tout petit peu moins de 4 euros, donc pour la majorité des familles, ça peut même être le double). Et cerise sur le gâteau, il faut huit élèves "de dernière minute" minimum pour que la cantine centrale ajuste le nombre de repas livrés.

Récapitulons : un enfant vient à la cantine pour une raison bonne ou mauvaise alors qu'il n'a pas été inscrit dans les temps. Il va donc payer prix du repas + 5 euros pour avoir, potentiellement un morceau de la ration de ses camarades. Qui eux-même n'auront pas la quantité prévue pour leur repas alors qu'ils sont régulièrement inscrits.

Alors sur un plat de ratatouille pour 150 élèves, ça va, s'il s'agit de yaourts ou de portions indivuelles, ça devient plus compliqué.

Vous savez ce qu'a répondu la municipalité quand l'opposition s'est indignée de ces 5 euros sans nuances ? "C'est la justice sociale selon nous".

Ça doit se retrouver avec un peu de patience sur les vidéos des conseils municipaux de l'an passé.

Du coup quand ils nous font leur grand numéro sur les efforts pour notre quartier (qui doit représenter un petit quart des habitants de la ville), comprenez qu'on y croit pas trop, voire qu'un rictus crispé s'installe sur notre visage.

Mais vous savez quoi ? C'est de notre faute, on est les pauvres. On a pas mérité d'être riches et d'avoir la qualité de service public qui va avec. On a pas mérité des fenêtres qui ferment (ou ouvrent) dans une école étanche. On a pas mérité des réflexions sur l'urbanisation et le maintien d'une saine mixité, qui était pourtant une des grandes réussites de ce quartier il y a encore quelques années.

Et puis on s'en fout. On construit du neuf, le tramway arrivera au pied de la rue. Alors pendant quelques années ces nouveaux habitants plus riches mettrons leurs enfants dans le privé. Puis petit à petit on virera la misère sociale à coup de pression financière et de maltraitance dans d'autres villes, les plus riches gagneront, et là on reconstruira une école flambant neuve pour faire plaisir à cet électorat tout neuf, j'imagine.

Tant pis pour les mômes sacrifiés entre temps.

Tant pis pour le constat effarant qu'il y a des enfants de moins de 10 ans incontrôlables, et qu'on ne peut pas juste dire que c'est la faute des parents.

Tant pis pour la remise en question.

Après nous le déluge (et en plus on est en zone inondable).

Sauf si entretemps la colère des pauvres, de ceux qu'on maintient la tête sous l'eau en les traitant d'assistés devient plus forte. Et là qui vivra verra, la tête de qui sur quelle pique...

J'ai mal à mon quartier, j'ai mal à mes valeurs.

J'ai mal aux systématiques réponses des élus "c'est pas nous c'est les autres".

J'ai mal au monde.