La vie et toutes ces sortes de choses

mercredi 27 août 2025

Quand vient la fin de l'été

Tout juste revenus d'un séjour placé sous le signe des félins dans le Gers, Lomalarchovitch m'a faussé compagnie pour retrouver son père une grosse semaine avant la rentrée. Côté positif : cette joie à retrouver l'autre parent, à chaque fois, me dit que cet enfant a trouvé sa place dans cette vie à deux foyers. Côté négatif : aucun. S'il est content je suis contente et surtout, pas mécontente de retrouver un rythme "détendu" pour ma rentrée, qui précède la sienne d'une courte semaine.

C'est même quatre jours de solitude à la maison qui m'attendaient pour mes derniers jours de congés : au programme, câlins avec les chats, lecture, lecture, lecture, musique, musique, séries, films et Rock en Seine.

Une petite fille à son premier concert.

Je me demande par ailleurs si je ne suis pas un peu vieille pour ces conneries. Enfin c'est ce que je me dis à chaque fois : je profite des concerts mais la bière à 10 balles + consigne du gobelet, l'épouvantable marche dans la poussière, Ventoline à la main car la poussière qui recouvre tout est mauvaise pour l'asthme, pieds défoncés, dos à la peine...

Cette année, j'entrais par le côté Pont de Sèvres, je m'étais garée à gratos pas loin du métro, mais j'avais oublié un détail : cette entrée n'ouvre comme sortie qu'à la toute fin de journée. Traversée, donc, du site entier, du carrefour de l'enfer juste à l'entrée du Pont de Saint-Cloud, tramway pour faire le trajet dans l'autre sens, escalade de l'immense escalier qui mène du tram au pont, marche jusqu'à la voiture (toujours sponsorisée par mon distributeur de salbutamol préféré). Puis retour avec arrêt technique au drive du McDo pas loin de chez moi pour choper un big mac, dévoré à poil sur mon lit sous le regard bienveillant et avide des chats. Épuisée, totalement.

J'ai aimé les concerts, avec des "mais" dans tous les coins. (Scène sous-dimensionnée pour Last Train qui a attiré une foule dense, pas très grave, je les vois en décembre, mais ils auraient mérité la grande scène sans problème, Fatdog, plus de bonne ambiance que de bonne musique, même si ça a fait le truc, Wallows cool mais ça reste du rock à minettes (sans jeu de mot, mais enfin si, ne boudons pas notre plaisir), Fontaines D.C. épuisés, musicalement hyper solides, sauf un passage sur Desire, pas très heureusement harmonisé, mais foule encore plus hystérique qu'au Zénith, Grian Chatten qui donne encore plus que ce qu'il a, mais que j'ai senti physiquement crevé, qui fait en plus annexe de la sécurité en désignant les gens en difficulté aux équipes en charge. Et, je veux dire, ça me dit du bien de ce gars. Carlos O'Connell le nez sur sa guitare au lieu de venir regarder la tronche des gens aux premiers rangs. Deego au visage fermé. Bref, ces petits gars ont besoin de sommeil, de faire de la musique pour le plaisir et de se ressourcer. #MèreJuive

Grian Chatten de Fontaines D.C. sur scène.

Je me dis qu'il y a là un paradoxe étonnant : ce groupe a explosé en France en l'espace d'un an et, c'est bien normal, ils foncent dans le tas et prennent ce qu'ils ont à prendre. Je disais l'autre jour qu'ils joueraient probablement dans des stades dans un avenir très proche (et donc que c'était peut-être mon dernier concert, car je hais les concerts dans les stades, et ça me désole un peu). Mais il y a aussi quelque chose de l'ordre du trop. Cette foule, immense, un bon quart vêtue aux couleurs du merch, devient un peu fanatique et ça heurte en moi quelque chose de profond. Aussi bien à cause de mon caractère rebelle à toute forme de cadre obligatoire que par un effroi devant les mouvements massifs.

J'ai d'autres choses à dire sur le sujet, mais je ne l'écrirai pas sur les internets : voyons-nous si vous voulez en savoir plus !

Ciel de fin d'été rue de Liège à Paris.

Bref, comme toutes les fois où je suis sortie de ce festival, je me demande si j'y retournerai. On verra bien.

Reprise hier, sans transition.

C'est reparti pour un tour.

Le soleil qui perce entre les nuages, au dessus des toits parisiens.

Bonus : les toutes dernières notes du concert

samedi 16 août 2025

Carte postale 3

Je ne sais pas comment je me débrouille, je prends toujours trop de choses quand on part. Pourtant j'ai la valise sobre, quand je compare avec certaines copines. Pas de tenues de soirées multiples au cas où, pas de maquillage ou de sèche-cheveux, je vis en robe longue ou short et débardeur. Médicaments, chargeurs, trousse de toilette, ordinateur, culottes, sous-vêtements, une paire de sandales... Et, je ne sais pas comment, on arrive à ce stade où fermer le sac devient difficile. À chaque retour la promesse de faire plus léger la fois suivante (oui mais s'il pleut ? Et si on danse ?)

Bref, ce matin, nous ressemblions à des tortues géantes avec Lomalarchovitch : sac à dos ou de voyage à l'arrière, sac à petit bordel quotidien devant, plus le tote bag avec mon PC, mes écouteurs, le chargeur, rapport au fait qu'il avait oublié ses claquettes et que les rajouter dans mon sac l'a mené aux limites de capacité de sa fermeture éclair. Et puis un bouquin papier en cours (et 146 autres non lus + un en cours dans la liseuse, sait-on jamais que l'apocalypse nous surprenne dans le Gers ?)

Incorrigible (mais je crois que je vais vraiment tout utiliser, ou à peu près, ne serait-ce que pour l'honneur, non ?)

(Je viens de vérifier, 40 litres pour un séjour d'une petite semaine, ça n'est quand même pas si déraisonnable, je crois, en tout cas c'est pour rassurer Tante Pim qui s'inquiéterait peut-être : oui ça tient dans la voiture !)

Maintenant l'un des moments stressants du voyage : vérifier que la prunelle de mes yeux n'oublie pas un élément onéreux de sa propre bagagerie, qu'il ne l'a pas vidé dans la travée pour en sortir son casque et toutes ces sortes de réjouissances auxquelles il m'a habituée.

Détendez-vous, Madame, c'est les vacances !

Mon sac de voyage vide à l'exception d'un chat noir à l'intérieur, qui a été sorti du contenant dans le cadre de ce voyage.
Oui, je suis partie sans le chat !, août 2025

jeudi 7 août 2025

Carte postale #2

Si j'étais un arbre, je serais probablement un pin parasol.

Je vous l'accorde, c'est un arbre chiant : ses racines déforment les sols, ses épines, sèches, tombées au sol, piquent les pieds et ne se laissent pas ratisser facilement. Quand il est malade il pleure une substance collante, si vous avez de la chance, ses pignes recèlent des trésors qui vous laisseront les doigts - et tout ce que vous toucherez - noirs.

Mais ce sont mes arbres amis. J'ai passé tous mes étés en leur compagnie. Le vent les rend frémissants comme des amoureux. Même taillés en brocolis, ils sont majestueux. Leurs branches forment des sculptures envoûtantes. "Un bonsaï géant !" s'est exclamé quelqu'une de ma connaissance en les voyant, c'est exactement ça.

Quand j'étais petite, je passais des heures, dans le jardin, à collecter les pignons. Combien de doigts meurtris entre la pierre et la marche de la terrasse pour ouvrir leurs coques et recueillir, en masse, les précieux. Dommage, je n'en étais pas folle, mais la quête et l'air gourmand des autres étaient mes récompenses.

Maintenant on n'en trouve presque plus. Même les pâtisseries locales sont faites avec des pignons chinois.

On parle, dans la région, de la maladie qui s'abat sur eux, depuis quelques années. Qui y va de son traitement, qui de ses larves de coccinelles, onéreuses, mais miraculeuses, paraît-il. Je constate qu'ils sont redevenus verts, cette année, plus de zones roussies. On surveille, la chienne et moi, du fond de nos fauteuils, sur la terrasse.

Surtout, on les abat. Une dizaine de moins dans ce qui fut une pinède, du temps de l'enfance de mon père. Ils gênent la vue sur la mer. Ce n'est pas comme s'il suffisait d'aller jusqu'à la rue pour regarder la mer, 150 mètres plus bas. Et mon syndrome d'Idéfix pleure devant ces copains bicentenaires abattus.

Et vraiment, si vous n'êtes sensibles à rien de tout ça, dites-vous que ces arbres sont formidables : ils donnent l'heure de l'apéro, quand la lumière dorée vient frapper leurs troncs.

Alors voilà, si je devais être un arbre, même un peu encombrant, oui, c'est sûr, je serais un pin parasol au bord de la Méditerranée.

Des pins parasol dans la lumière dorée de fin de journée.

dimanche 3 août 2025

Carte postale

Il y a quelque chose d'inhabituel dans l'air, cet été. Ou plutôt, il ressemble plus aux étés d'antan. Après dix ou quinze ans de températures écrasantes, de taux d'humidité effarants, c'est une douce chaleur sèche qui nous entoure ces jours-ci. On est bien, peau à l'air, offerte au soleil et au vent, et pas affalés, transpirants à l'idée de se lever pour aller chercher un verre d'eau.

La température de la mer est accordée à celle de l'air : autour de 25, ni bouillon trop chaud, ni lendemain de mistral (encore qu''on soit un lendemain de mistral, étrange, lui aussi, mais l'eau était accueillante ce matin).

Pour la première fois depuis... toujours ? Très longtemps, en tout cas, j'ai dépensé des sous dans un maillot de bains de qualité, j'aurais dû commencer avant, ça change tout. J'ai le mix parfait entre un décolleté vertigineux - et des voisins de plage soudain très bavards et courtois - et la possibilité de nager, même, de loin en loin, un peu sportivement, tout reste à sa place. Les bouts de moi, le maillot. Révélation.

La plage, justement, est assez peu peuplée. Peut-être que les aoûtiens ne sont pas encore installés, peut-être qu'on arrive enfin à faire comme j'aime : y descendre tôt, 9 heures à peine passées, remonter avant la descente de ceux qui supportent le soleil de midi. Moi, à midi, douchée de frais, je commence à parler apéro, on déjeune, pas tôt, on sieste au plus chaud de la journée.

À une exception près (une jeune mère qui est littéralement venue s'installer au milieu de mes affaires, sans bonjour ni merde ni quoi que ce soit d'autre), nos voisins de serviette sont donc matinaux et courtois. L'une ce matin est venue plaisanter de mes mésaventures d'occupation illicite de mes tongs, on a ri, d'autres demandent d'où on vient, si on connaît la région, partagent leurs découvertes, restaurants ou beaux cailloux pêchés au fond de l'eau. Le décolleté, vous dis-je.

Assise sur la terrasse en compagnie de ma petite soeur (la chienne de la maison, gâtée pourrie comme une petite dernière) on flaire la ratatouille qui embaume, les bourdons en vadrouille, on paresse et on baille, l'une après l'autre, à s'en décrocher la mâchoire. On est bien, toutes les deux. On sait que la foule (familiale) va surgir, les uns d'une quête de pain, les autres d'un jeu, d'un livre, d'un moment à l'ombre. La vie va s'agiter de nouveau. Un peu. Elle sera moins sereine, parfois Alors on profite du calme et de la chaleur douce.

La plage des Cigales, dont je connais depuis toujours le moindre grain de sable, mon endroit refuge, douceur, ma maison de sable, de sel et d'eau.
La plage des Cigales, dont je connais depuis toujours le moindre grain de sable, mon endroit refuge, douceur, ma maison de sable, de sel et d'eau., août 2025

lundi 28 juillet 2025

Libres mais pas trop

Cette idée de liberté, à laquelle on aspire plus ou moins toutes et tous, qui figure même dans notre devise, elle est quand même fort relative. En fonction de l'endroit du monde où l'on vit, de ses lois. De l'assouvissement de nos besoins primaires ou pas. Et rassurez-vous, je n'ai pas fait de longues et onéreuses études de philosophie pour en arriver à cette conclusion tarte à la crème.

C'est d'ailleurs curieux qu'on emploie le même mot pour parler d'une personne célibataire et d'un prisonnier qu'on relâche. (Le couple est-il une prison ? Vous avez deux heures et probablement un billet à lire sur le couvent d'ici peu).

Et même, la plupart d'entre nous tiennent à leur(s) liberté(s) mais pas d'une façon jusqu'au-boutiste. Si on parle d'ici et de maintenant, que faudrait-il pour être absolument libre ? Ne pas avoir d'identité reconnue. Ne pas payer d'impôts, donc ne jamais déclarer de revenus. Donc avoir une activité qui peut se payer en liquide, ou en services rendus. Ne se soumettre à aucune forme d'autorité. Echapper au système bancaire. La vie devient tout de suite très compliquée. Enfin trop pour moi.

Alors voilà, on veut être libre, jusqu'à un certain point, pour la plupart des gens. Dans la limite des règles établies par l'endroit où l'on vit, plus ou moins (et cette nuance a de l'importance) et de nos attaches affectives.

Le soleil aperçu dans une couche de nuages furieux, le ciel plus dégagé en dessous, les faites des toits parisiens, en bas.

Et ensuite ?

Arg. Là aussi, il y a des limites à ce que la plupart d'entre nous est prêt(e) à accepter.

Par exemple : la semaine dernière j'ai vu quatre films différents [1], aux horaires à peu près choisis (avec comme contraintes : mes horaires de boulot, ceux des cinémas et, pour celui que j'ai vu accompagnée, les contraintes de l'autre personne concernée). Pas tellement besoin de me soucier de transports, de météo, d'heure à laquelle rentrer, de dépenses impossibles à assumer. Pas non plus besoin de m'inquiéter de mon droit à circuler - à part l'arrivée du Tour de France qui a légèrement et ponctuellement impacté les transports en commun parisiens hier, de la façon de m'habiller (résolument trop optimiste hier).

De la bonne liberté comme on aime, facile, légère.

Impossible dans d'autres régions du monde, néanmoins.

Et plus compliquée pour un certain nombre de personnes qui vivent au même endroit que moi, au même moment.

Savourons.

Le corollaire le plus violent de l'envie absolue de liberté, c'est la solitude. Faire ce qu'on veut, quand on le veut, sans tenir compte de quiconque, ça ramène assez vite à être seul(e) le plus souvent. Je ne suis pas sûre que de vivre en absolu(e) solitaire tout au long de sa vie soit quelque chose de bénéfique. Nous sommes des animaux sociaux, nous affranchir de contacts, de connivence, de codes partagés, de chaleur humaine, c'est quand même s'amputer d'une bonne part de ce qui rend la vie vivable.

Pour autant, on se la fait grignoter, notre liberté, depuis des années. Sans trop de sursauts. Je veux dire : il y a des gens pour protester, s'indigner. Heureusement. Mais globalement nos territoires de liberté sont rétrécis, insidieusement. Pas encore de façon très sensible, pour beaucoup de gens.

J'ai peur, pour les décennies à venir, que le réveil ne soit brutal. Si un réveil est encore possible. Qu'il ne s'agira plus de liberté de se divertir, mais de sujets beaucoup plus fondamentaux, qui form(ai)ent la société dans laquelle nous avons grandi.

Tout ça pour dire que trop de liberté, c'est sans doute difficile à vivre. Nous avons trop besoin des liens que nous créons pour ne pas accepter les contraintes qui vont avec. Mais pas assez, c'est invivable. Même abruti(e)s de divertissements et de vie facilitée par le progrès.

Est-ce qu'on est sûr(e)s de ce qu'on veut sacrifier ?

Note

[1] Dont, je ne me lasse pas d'en rire, Eddington, qui se passe sur fond de Covid et de complotisme, et figurez-vous que je suis sortie du ciné avec la 5G alors que j'y étais entrée en 4G. Il se trouve que c'était un upgrade gratuit de mon cher opérateur de téléphone mobile, qui, coup de bol, a été déployé au bon moment pour me faire rigoler. Pensez, dans 20 ans, quand je ne me souviendrai plus du pourquoi de cette note, à me rappeler les blagues sur les vaccins et la 5G, merci, bisous.