J'ai découvert cette histoire d'émotions à un âge adulte avancé. Avant, je pensais que tout le monde ressentait fort mais que j'étais un peu nulle à me laisser envahir alors que tout le monde semblait en parfait auto-contrôle. C'est au boulot, dans une période un peu difficile, que je me suis rendu compte que j'étais la seule à être en colère face à une série d'injustices (et quand je dis en colère, c'est pas qu'un peu). Ça n'a pas arrangé mon auto diagnostic, jusqu'à ce qu'enfin je trouve des clés pour comprendre.
J'écrivais l'autre jour que je me servais mieux de tout ça, que je le subissais moins. On est encore assez loin de la perfection, notez bien.
Parfois, quand ça déborde, j'ai l'impression que je pourrais, tellement je vibre fort, déclencher un tsunami d'un revers de la main, un tremblement de terre transmis de mon cœur au noyau. N'appelez pas les hommes en blanc, je sais que je ne peux pas vraiment le faire. Mais c'est assez indescriptible sans images un peu parlantes.
Alors j'écris. Pas pour faire joli, pas pour raconter une histoire. Je prends le magma à mains nues et je tente de lui donner une forme. Mes doigts crépitent sur le clavier (je ne pourrais pas faire ça à la main, imaginez quel serait mon sort si j'étais née avant l'époque des machines à écrire, puis des ordinateurs). Dans ma tête c'est comme creuser des tranchées dans la lave. Ou vomir après une soirée de l'enfer. Ça n'a rien à voir avec un projet esthétique, artistique ou intellectuel, c'est ma seule façon efficace de me laisser traverser sans me briser, de mettre à distance suffisamment ce qui me bouleverse pour fonctionner à peu près, ensuite. En tout cas, donner l'illusion de fonctionner (si vous saviez à quel point je suis bonne comédienne).
Oui, je pourrais faire ça sur un document au fond de mon disque dur, c'est vrai. J'ai pris de mauvaises habitudes. Et on est si peu nombreux, encore, à lire ces trucs étranges que sont les blogs... désolée pour le bordel, les flaques de lave et de vomi.
(Collègues "Sorcières" de Brancusi)
---
Pour me faciliter la vie, parce qu'il est bien connu que le manque de sommeil et les trucs déréglés aident grandement à mener une vie sereine, je n'ai pas un mais deux traitements en cours d'expérimentation.
Hashimoto résiste un peu, on tente la dose au-dessus. J'ai donc allongé mon trajet retour d'un bon kilomètre, ce soir, pour aller chercher la nouvelle ordonnance et... ai loupé la secrétaire de 3 minutes. Respirons.
Ah non, je ne peux pas. Ça faisait deux ans que je faisais traîner la prise de ce rv avec une pneumologue pour un point asthme. Comme je suis tombée sur une professionnelle alerte, elle tente un allègement de traitement avec un changement de médicament pour un plus contraignant, suppression des antihistaminiques. C'était le 2 avril. Devinez ce qu'il se passe depuis ?
Les putains d'arbres copulent. Ça envoie du pollen dans tous les sens. Son truc fonctionne modérément, j'avais espoir de tenir jusqu'au rv de débrief en juillet. Je pense qu'à la place je vais appeler ma généraliste pour revenir aux bons vieux trucs avec lesquels j'avais l'assurance de respirer et envoyer la spécialiste à 100 balles les dix minutes aller se faire cuire le cul.
Ça ne va pas me tuer, mais ça m'épuise, ces galères pas très graves mais bien chiantes.
Sans parler de la défaite morale de dysfonctionner du corps en plus de la tête. (J'en vois deux qui rigolent au fond de la salle en disant "oui mais au moins tu es obligée de t'occuper de toi, gnagnagna". Je vous aime mais ça ne me fait pas rire DU TOUT).
Et alors là, la sorcellerie n'a aucune sorte d'effet, hein. J'ai bien essayé de me coller les doigts dans le nez en chantant une incantation, mais tout ce que j'ai gagné c'est une invitation à l'Eurovision l'an prochain.
---
Bref, la sorcellerie ne résout pas tout, au contraire, elle ajoute bien souvent des soucis. Quand je pense qu'il y a des gens tièdes et des, peut-être les mêmes, capables de ne penser à rien.
Je ne vais pas bien, donc, ces jours-ci, mais ne vous en faites pas.