Je n'aime pas Noël.
Voilà, c'est dit, comme une atrocité dans la bouche d'une jeune fille bien éduquée, comme on viendrait faire un bruit malséant à une table de gens raffinés, l'horreur. Comment peut-on ne pas aimer Noël ? On peut (je crois même que nous sommes nombreux).
Ca date, je pense, du moment où le mois de novembre/début décembre a commencé à ressembler à une sorte de calendrier macabre de dates où des gens que j'aimais ne seraient plus jamais là pour se l'entendre dire. D'ailleurs, c'est pas compliqué, il y en a un de plus cette année. Et même si c'est un mois qui continent aussi des dates d'anniversaires de gens que j'aime et qui sont encore bien là, c'est devenu difficile à traverser. En ressenti, là, au moment où j'écris, on doit en être au 40 novembre, ou peut-être 41, bref, pas la joie.
Pendant la période des enfants petits, j'ai joué le jeu du sapin, du père Noël et de toutes ces choses qui font gling gling. Mais c'est pas compliqué, plus les années passent, plus ça devient un truc contre lequel je me révolte violemment.
Je n'ai rien contre le fait d'être avec des gens proches pour manger de bonnes choses ensemble et se faire des cadeaux, hein. C'est juste cette course à l'armement de la déco, du meilleur cadeau, du menu parfait, du bonheur codifié à date fixe... ça me hérisse. Je ne suis même pas catholique, en plus, alors la naissance du petit, vous pensez.
Moi, là, mon énorme fantasme de Noël, ça serait de partir. Loin, au moins un peu. Il y aurait une maison confortable, je verrais la mer par la fenêtre[1]. S'il faisait beau, j'irais me promener à pas lents le long de la plage. Il y aurait du bon à manger sans effort de préparation. Il y aurait de la musique à briser l'âme. Il y aurait des livres, partout, des bouquins-copains de toujours, de nouveaux à découvrir, des qui font battre le cœur. Des films à foison. Un canapé dans lequel se vautrer de toutes les façons possibles (non, je ne sais toujours pas me tenir correctement).
Et peut-être que si je regardais du coin de l'œil dans le miroir, au-dessus de la cheminée qui flambe, je verrais des ombres passer et je me rendrais compte que je n'y suis pas toute seule, finalement.
Note
[1] D'ailleurs, c'est fou que personne n'ait jamais compris, dans ma vie, que pour me guérir d'à peu près tout, il suffit de m'emmener à la mer. C'est encore mieux si c'est la Méditerranée et qu'on peut manger des panisses, mais n'importe quelle mer me répare suffisamment pour affronter le monde à nouveau. Et non, personne, jamais, ne m'a dit "Allez viens, je t'emmène voire la mer, elle et mes bras autour de toi, ça va aller".