mercredi 28 août 2024

Money money money

J'ai l'impression de ne parler que de fric, ces derniers temps[1]. Principalement pour dire que je suis fauchée. Mais ça me donne mauvaise conscience de dire ça : je sais fort bien que je fais partie des privilégiés.

En effet, après de nombreuses années de tripalium, j'ai l'honneur et l'avantage d'être passée au-dessus du salaire moyen des français employés du secteur privé. Du coup, assez nettement au-dessus du salaire médian. Bien, mettons-nous une claque dans le dos, ça n'a pas été rien d'arriver à avoir un revenu en vague rapport avec mon niveau d'expertise et d'expérience. Alors comment ça se fait que ça soit, à défaut de vraiment juste au quotidien, trop pour multiplier les vacances ?

Parce que, putain, pour une littéraire, je compte.

Alors OK, en tant que représentante des classes moyennes, je bénéficie de peu d'aides sociales. Ok mes enfants mangent. Beaucoup. Ils dilapident mes revenus en comté râpé et parmesan. Ok l'un d'entre eux pousse tellement que je suis revenue au stade du nourrisson à qui on refait la garde robe trois fois par an. OK on privilégie le frais au marché plutôt qu'à l'hypermarché (encore que la différence n'est pas saisissante). Ok j'ai un plan de vie qui fait que je privilégie un petit confort au quotidien plutôt que de se serrer la ceinture toute l'année pour une semaine de vacances de rêves.

Mais, quand même.

J'ai beau me foutre un peu de l'argent, j'ai une fâcheuse tendance à vivre dans le monde réel, quoi qu'on en dise, et c'est chiant d'arriver à 48 ans, 11 mois, 28 jours pour continuer à avoir des fins de mois difficiles à partir du 15-20 et à se demander quel abonnement on pourrait supprimer sans que ça ne soit une punition.

Soyons très clairs : je ne me plains pas. D'autant que j'ai encore de quoi me donner un peu d'air sous forme de concerts, bouquins, verres en terrasses ou à couvert selon la météo. Pas tout le temps, mais régulièrement.

Je m'effare des conditions de vie des gens qui sont vraiment vraiment fauchés, eux.

(Et que personne ne me conseille de me trouver un mec riche. Dans l'immense majorité des cas, les mecs riches aiment les femmes pas comme moi et tendent à s'intéresser à des sujets chiants, et quand même, faut pas déconner, on mangera encore du riz et des patates et marre plutôt que de se fader un conducteur d'Audi).

Oué. Fuquons le capitalisme, vivons d'amour,d'eau fraîche et de pinard, toussa.

Note

[1] A vrai dire j'ai l'impression de moins parler. J'ai des bouts de billets qui virevoltent et je soupire en faisant "meh". Peut-être trop d'exposition ces derniers mois, avec des conséquences un peu désagréables. Peut-être que je me fatigue. Peut-être que je rumine deux trois sujets qui me bouffent de l'énergie. Bref, aucune idée d'où je vais côté blogs et ça ne changera pas le monde.

vendredi 23 août 2024

On the road

J'ai songé en me mettant au volant que c'était sans doute la première fois de ma vie que j'allais faire tout le trajet de retour de chez mes parents seule au volant.

Je n'aime pas beaucoup conduire longtemps serait l'explication logique, elle cache un empilement d'autres choses, mais comme j'ai décidé de ne plus me laisser emmerder par ça, j'ai pris le volant, et puis voilà.

On a quand même coupé la route en une grande et une petite moitié, parce que bon, 900 kilomètres, quand même.

Premier jour : ambiance au top, circulation chiante et mistral dans la tronche. On était contents d'arriver à l'étape, même si on s'est, quelques heures après, accusés mutuellement d'avoir ronflé / gémi et empêché les autres de dormir.

Le lendemain, enfants ramollos mais route au top. J'étais donc là, à écouter Fontaines D.C. en me réjouissant du concert à venir, de ce chouette album (qui a fini de sortir aujourd'hui pour ma plus grande joie), à rouler vite[1] sur l'autoroute aussi dégagée qu'ensoleillée, mes mômes moitié endormis à côté de moi, chaque chanson comme un mini univers.

Je ne dirais pas que je ferais ça tous les jours, j'ai trouvé que ça n'en finissait pas, par moments, je suis encore sous le coup de la surprise d'arriver par le périph' (ça n'arrive jamais, c'est toujours tellement bouché que le GPS nous fait contourner de façon plus ou moins efficace) et voir en vrai la voie réservée aux JO !!

Nous voici rentrés, tous les trois bien contents de ce moment ensemble. Encore quelques jours de vacances pour moi, quelques uns de plus pour Lomalarchovitch. Cro-Mi est en cours de pré-rentrée. Les jours raccourcissent nettement, mais nos bonnes mines ont encore le goût de l'été.

Il est temps de planifier les prochaines vacances.

Note

[1] Dans la limite de la réglementation en vigueur

samedi 17 août 2024

La réinvention de la roue de la solitude

Je crois que c'est la chose qui est la plus (et la seule à être vraiment) effrayante, dans le retour à la vie célibataire : et s'il m'arrive quelque chose d'embêtant ? Accident, gros pépin de santé, dans quel délai vais-je mourir, qui, des chats et des enfants, me mangera en premier ?

Plus sérieusement, c'est surtout aux enfants, que je pense. Ils ont chacun un père, ils ne seront pas rejetés sur le rivage, mais quand même. C'est pas rien, un parent, quand on essaie de faire environ bien les choses. Il y a donc une sorte de responsabilité supplémentaire qu'on se créé à vivre seul avec charge d'âme.

Pour les angoisses de mort solitaire d'une vieille dame à chats, ça peut encore attendre un peu.

Pour être honnête, ça n'est pas non plus une pensée quotidienne qui me conduit à marcher en chaussettes antidérapantes pour éviter l'accident domestique bête, juste une pensée, de loin en loin, une vague inquiétude.

Il y a aussi l'épreuve de la réalité. L'autre jour je disais que j'ai peu de goût pour les fêtes "conventionnelles" dont mon anniversaire. C'est plutôt une bonne nouvelle, car ce qui me reste des 13 derniers, ce sont ceux pour lesquels les ami(e)s ont mis la main à la patte d'une façon ou d'une autre. J'ai perdu l'habitude que quelqu'un fasse "quelque chose" de particulier (à part me laisser choisir la sauce de la pasta) à cette occasion si je ne l'ai pas expressément demandé.

Mais là, dans la vraie vie, on verra si je fais autant la maline. Et ça approche à grands pas. Peut-être que j'y pense aussi parce que c'est la première fois depuis longtemps que je suis réellement seule à cette date ? Effet de cap à passer qui s'accroche à ce qu'il peut ?

Je ne suis pas très inquiète ; dans aucun des cas possible il n'y aura de drame. Juste un de ces moments où la vie peut, éventuellement, ricaner un peu en disant "tu fais toujours la fière avec tes cases dont tu n'as rien à faire ?"

samedi 10 août 2024

Les moments parfaits (face A)

J'ai passé, à deux ou trois années près, tous mes étés dans cette maison. J'y croise les ombres de mon enfance partout, j'ai été puissamment heureuse ici, entourée de famille, d'amis, de rires, mon attachement à cet endroit est fort. C'est grâce à ça que j'arrive à mettre des œillères et ignorer le trop de monde, le trop de bouchons, les comportements aberrants qui sont fréquents en été, là-bas.

Tous les jours, après le déjeuner dehors, je retrouve ma grande joie de toujours, lire, dans une chambre plongée dans la pénombre, bercée par le ronronnement du ventilateur. J'ai vécu des vacances thématiques : Labiche un été, dans des vieux livres même pas coupés, pour certains, l'essentiel des Rougon-Macquart le suivant.

Presque tous les arbres du jardin et de ceux alentours sont de vieux copains, pour l'essentiel plus vieux que moi. Regarder l'air bouger entre leurs branches et la lumière changer dans leurs feuilles ou épines occupe de nombreuses heures de mes vacances.

Cet été, précisément, s'arrêter avant d'arriver à la maison pour manger un sorbet, avec Lomalarchovitch, en soupirant qu'enfin, ça commence pour de bon, nos vacances partagées.

Et puis la première baignade dans l'eau chaude et curieusement claire pour une fin d'après-midi. Le corps qui se détend dans l'eau, qui oublie ses frontières, sa forme. Nager ensemble en bavardant. Les dépressions de l'eau qui vibrent sous mes doigts, le bleu cru du ciel, celui de la mer.

Le temps passé à bavarder, lui et moi, à partir en mission tous les deux.

D'une certaine façon, c'est un bout de mon essence à la source de laquelle je retourne, tous les ans. Malgré tout ce qui est compliqué. Malgré tout ce qui fonctionne de moins en moins.

jeudi 1 août 2024

Je ne sais pas nager

"Mais qu'est-ce qu'elle nous a gonflés avec sa piscine, alors, si elle ne sait pas nager ?" êtes-vous en droit de réagir au titre de ce billet. En fait je sais nager, c'est juste qu'on ne m'a jamais appris.

Il se trouve que j'ai très tôt flotté intuitivement, j'étais de ces enfants qui n'avaient pas peur de l'eau, s'y sentaient bien, peu à peu j'ai bougé les bras et les jambes de façon désordonnée, puis un peu moins, puis de plus en plus en imitant les grands et voilà. Dans ma famille on ne plaisante pas avec un sujet : les enfants doivent pouvoir flotter et se diriger en cas de chute à l'eau.

Ah oui, et quand on est cap d'aller chercher une pièce de 10 francs (now 2 euros, bonjour l'augmentation des prix) au fond de la mer là où on a pas pied, on gagne un masque, des palmes et un tuba pour aller mater les poissons en se faisant rôtir le dos.

Le reste est littérature.

Ca m'a pris très longtemps et un grand nombre de lumbagos avant de réaliser que je pourrais faire ça régulièrement dans une piscine plutôt que d'attendre l'été et ses vacances méditerranéennes. Une fois immergée et après quelques séances, je me suis un peu interrogée et c'est dotée des encouragements de fredoche, elle-même nageuse sérieuse, et de quelques tutos youtube que j'ai appris la brasse coulée, steuplé. J'avais même démarré un dégrossissage de mon embryon de crawl de débutante [1], j'ai même eu droit à un bref coaching (sur la terre ferme de la belle Avignon, pas dans la piscine) d'un champion olympique, un vrai, sur le sujet[2]...

... quand ma piscine a fermé pour cause de gros travaux, à l'heure où on se parle elle sert de site d'entraînement pour les épreuves de natation synchronisée pour les JO. Il paraît qu'on en récupérera pas l'usage avant début 2025, j'ai hâte de la retrouver.

Quand on bossait encore à Nanterre, une fois par semaine, j'allais nager le midi, une pause d'un kilomètre qui me faisait du bien au corps et à la tête.

Je suis complètement consciente de n'avoir aucune technique, de nager de la façon très inefficace. Mais j'ai la grande fierté de faire mon kilomètre sans m'arrêter à chaque bout de ligne, PAS comme un certain nombre de frimeurs croisés dans les couloirs (de natation, pas du métro) vite hors de combat.

Et lente, aussi. Je veux dire, le temps que je fasse un kilomètre, Léon Marchand fait le sien, fait des enfants, les élève et les envoie à l'université, genre. Et il a préparé le dîner en plus.

Mais je m'en fous complètement. Je suis en train de faire des voeux pour échapper aux méduses cet été et faire des tours de zone de baignade avec mon fils. Je me languis de ma piscine, qui aura sans doute pas mal changé quand j'y retournerai. Et de ces quelques dizaines de minutes méditatives et mouillées qu'on partage, elle et moi (oui, en novembre aussi, même quand il pleut).

Et oui j'aurais pu aller dans une autre piscine mais j'aime les bassins de 50m, parce que dans les plus petits on passe son temps à tourner, et puis celle de la ville d'à côté, je l'aime pas et celle d'une autre ville pas loin, elle est hors de prix. Globalement ça coûte une blinde quand on est pas résident de la ville de la piscine.

Vivement, donc.

Ah oui, je fais moteur immergé de stand up padel plein d'enfants, à mes heures perdues, aussi.

Notes

[1] Moins spectaculaire que celui de Lomalarchovitch qui a longtemps pratiqué une sorte de crawl-boxe très inefficace et éclaboussant, dois-je avouer

[2] C"est absolument véridique et la source d'une cruelle désillusion.