Sacrip'Anne

« Oui, je sais très bien, depuis longtemps, que j’ai un cœur déraisonnable, mais, de le savoir, ça ne m’arrête pas du tout. » (Colette)

mercredi 23 avril 2025

Démarrage en trombe

Le départ en vacances a été un peu tonique.

Disons que l'enfant qui m'accompagne, récupéré de la fin de journée la veille, a, dès le réveil montré des signes de défaillance digestive. De type vomissage dans le couloir à 6h15 du matin. Nettoyage du couloir, du fils, on a quand même réussi à attraper notre train et au bout d'une heure....

Idem. Dans le train. Sachez-le, les jours fériés, tout ce qu'on obtient de la SNCF en pareil cas est un sac poubelle et un rouleau de papier absorbant.

Et la tête en biais des voisins de voiture à qui on a fait passer un inoubliable voyage.

Bref, on est arrivés à l'heure voulue au lieu voulu, le gamin a fait une sieste de quatre heures et on est allés se promener dans l'air vivifiant de la mer pour reprendre nos esprits.

C'est seulement en mettant mes chaussures pour la promenade que je me suis rendu compte que...

Baskets dépareillées
avr. 2025

J'ai dû être distraite par autre chose au moment de quitter la maison.

(C'est strictement le même modèle, seule la "déco" change, pas de gêne à déplorer, juste un éclat de rire)

dimanche 20 avril 2025

Ame d'enfant

"Il faut garder son âme d'enfant".

Longtemps cette injonction m'a laissée de marbre. Un peu inquiétée, même. Je n'avais pas l'impression d'avoir d'âme d'enfant, d'ailleurs, déjà petite, on me disait que j'avais des airs de sorcière au regard perçant, alors les enfantillages...

Si je me plonge dans mes souvenirs de jeux, il y a quelques montages de forts Playmobil avec mon frère, qui me reviennent. Ou quand on enregistrait le journal sur le magnétophone, avec le même. Des virées dans les bois, entre mômes du village. Les soirées pyjama avec mon amie V.

Mais pas vraiment de souvenirs de jouets / jouer.

Juste la hâte de lire. Je me souviens comment chez V., justement, j'ai découvert "Les cornichons au chocolat" alors que je n'ai aucun souvenir d'à quoi on avait joué avant ou après. Papoté, ça c'est sûr, mais jouer ? Ca consiste en quoi, jouer ?

D'ailleurs avec mes enfants j'ai été nulle à ça, m'assoir par terre et faire vroum vroum, c'est quasiment une impossibilité physiologique (pas la partie m'assoir par terre).

En revanche je leur ai lu des centaines d'histoires, je leur ai raconté le monde.

Et bim. A la faveur d'un petit séisme intérieur[1], j'ai compris.

Je n'ai jamais eu de problème à garder mon âme d'enfant, au point que ça n'était pas une question, puisque je n'ai jamais cessé[2] de faire ce qui me ravissait alors : prendre un livre et partir dans un monde que lui et moi on se fabriquerait.

Notes

[1] Absolument rien qui ne soit agréable, mais dans le genre qui met tout en bordel sur son passage, l'agréable.

[2] Sauf l'année qui a suivi la naissance de Cro-Mi, débordée, mal partout dedans dehors, j'ai cru en crever, de ne pas pouvoir lire.

vendredi 18 avril 2025

On change, on vieillit

J'ai dû me faire, ces jours-ci, un aveu qui ne m'a pas plu du tout.

Imaginez-vous bien que, depuis 49 ans — bientôt 50 —, je me promène avec cette sorte de résilience à toute épreuve : dure à cuire mais sensible quand même, capable de me remettre sur pied, blablabla, bullshit and so on.

Bon.

J'ai constaté que je gérais moyennement bien la tristesse, en ce moment.

Enfin, on se comprend. La paire d’années 2023-2024 est passée par là, terrifiante à plus d’un point de vue : crainde de perdre ma mère, perdre un ami, me jeter à corps perdu dans une nouvelle tranche de vie, galérer tellement à trouver le bon dosage de la bonne molécule que j’ai cru, parfois, ne plus jamais me sentir bien.

Vous allez vous foutre de moi, mais ça prend du temps de se remettre, figurez-vous. Y a pas un jour youpla, tout va bien à nouveau, ou presque.

Il y a du mieux qui gagne, petit à petit. Et puis des jours sans, avec ou sans raison évidente.

Et des jours tristes, parfois.

Pas un drame.

Avant, quand j’étais triste, j’étais juste triste. Je pleurais toutes les larmes de mon corps, s’il le fallait. Je traînais mon drama le temps qu’il fallait, en général quelques heures, quelques jours, et puis c’était reparti.

Maintenant, quand le flot monte, je sens mes épaules remonter jusqu’à mes oreilles, tout mon corps se crisper, et un cri du cœur qui dit : « Oh non, putain, ça revient. »

Une sorte d’onde de choc qui n’en finit plus de se propager en cercles concentriques — mais dans l’autre sens (je fais les images bizarres que je veux, c’est mon blog, bordel).

Fort heureusement, ça passe. De plus en plus vite, j’ai l’impression. Mais ne nous portons pas la poisse avec des constats trop optimistes.

On change ; je n’ai plus de super-pouvoir pour contrer la tristesse.

On vieillit ; les stocks d’insouciance sont de plus en plus bas chaque année. Raison de plus pour en fabriquer dès qu’on peut. Ne serait-ce que quelques secondes.

mardi 15 avril 2025

La courbe de digestion

Il y a une courbe de la digestion.

Sur le coup, trois stratégies possibles. Toutes perdantes. "Mal" réagir, s'offusquer, crier, reprocher. c'est la porte ouverte au "tu n'as pas d'humour, tu te prends au sérieux, tu interprètes" et à l'ouverture d'un conflit que je n'ai aucune envie de déclencher. Comme dans tout acte de terrorisme, il y a des victimes collatérales et le moins elles s'en prennent plein la gueule par ma faute, le mieux je peux me regarder dans le miroir.

Ne pas réagir. Faire comme si la flèche n'en était pas une, rire pour de faux, ignorer, répondre à côté ou très sérieusement. Faire la bête. C'est celle que j'emploie le plus souvent. En toute connaissance de cause ; faire comme si de rien n'était, c'est lui donner le droit de recommencer. De toute façon il le prendra. Il aura la satisfaction de son trait d'esprit, pas celle de me voir me tortiller de douleur sous son nez et de pouvoir enfoncer le clou.

Supprimer les contacts, ce qui reviendrait à ne plus en avoir, ou quasi pas, avec une de mes personnes préférées au monde.

Il y a quelques jours je faisais ce que je pouvais pour esquiver souplement. Autre chose à foutre, plus urgent, plus prioritaire. Après tout, on ne parle pas de coups ou d'agressions physiques d'aucune sorte. Mettons ça à la bonne hauteur sur l'échelle de la gravité.

Même la Bavarde, qui a utilisé ce carburant avec délectation pendant des années, soupire, lève les yeux au ciel et me regarde l'air de demander si je le crois ou pas.

Non point. Plus maintenant.

La courbe de la digestion, donc. J'encaisse la violence des mots, j'ai un peu pitié de lui. Puis j'ai honte pour lui des dommages qu'il fait aux autres, aux miens. Puis vient une colère triste. Ca, c'était cette nuit. Et la vie reprend son cours, lentement.

Qu'on ne me demande pas ce qu'est cette résistance à planifier la prochaine occasion, pour autant[1].

(Une photo sans aucun rapport et pour laquelle j'ai renoncé à la fois aux concepts d'horizontalité et de verticalité.)

Note

[1] Je sais, tout ceci est cryptique.

vendredi 11 avril 2025

Mes copains du métro

En finissant de rentrer de ma belle bleue, tout à l'heure, j'ai fait connaissance d'une bande d'enfants dans le métro. Une demi douzaine d'enfants vifs et joyeux, cornaqués par une dame entre deux âges.

Au fil des places qui se libéraient autour de moi, je me suis retrouvée cernée par une, puis deux, puis trois, puis une autre en biais. Celle assise à côté de moi admirait les pattes d'épaule de mon perfecto, qui lui auraient tout à fait convenu pour garder en place son sac à dos, a-t-elle fini par me confier. J'ai cru voir un œil jaloux sur mon propre sac à dos mais ceci est une autre histoire.

Elle m'a ensuite fait admirer les lunettes de soleil de sa camarade assise en face de moi ; forme de coeur, strass, la paire parfaite pour une gaminette de 7 ou 8 ans qui s'exclamait "tout le monde me regarde ! "

Miss Sac à Dos me dit alors "c'est la marquise de Carabas !"

Je lui ai aussitôt demandé des nouvelles du chat botté, qui ne lui disait rien a priori, mais lui est revenu en tête quand toute la bande s'est mise à lui rappeler l'histoire, ou en tout cas une version approximative.

Miss Sac à Dos trouvait d'ailleurs que le chat botté n'avait pas de cœur, à manger de délicieux petits mammifères.

C'est ainsi que toute la bande a fini par rigoler devant une photo de Maïa en train de bouffer le vert des poireaux qui dépassait de la poubelle. "Vous lui direz, qu'elle est bizarre, les chats, ça ne mange pas de poireaux". Je lui ai répondu que j'étais bien d'accord avec son approche diététique mais que le chat ne m'avait pas cru.

Ma station est arrivée et je les ai quittés en leur disant que j'étais très heureuse de les avoir croisés.

Ils m'ont fait de grands saluts et j'ai fini mon trajet ravie de nos échanges absurdes et drôles. J'aime, chez les enfants, cette capacité à s'engouffrer dans n'importe quelle conversation, je ne sais pas ce qu'il faudrait changer au monde pour qu'ils la gardent en vieillissant.

Maïa the vert de poireaux slayer
avr. 2025