Sacrip'Anne

« Oui, je sais très bien, depuis longtemps, que j’ai un cœur déraisonnable, mais, de le savoir, ça ne m’arrête pas du tout. » (Colette)

vendredi 8 novembre 2024

Histoires de chats. Et de chiens. Et d'amour.

Voilà. Je suis officiellement une mémère à chats qui poste des histoires de chats. Comme ça c'est clair. Et puis c'est à la demande générale d'au moins deux personnes sans compter celles qui ne savent pas qu'elles auraient adoré me réclamer cette histoire. En plus le truc que j'ai en tête pour le couvent n'est pas encore passé de mes rêveries à mes doigts, donc : pourquoi pas ?

Je tiens d'ailleurs à rétablir des faits à l'attention des ennemis des chats. Beaucoup d'entre vous pensent que les chats sont indifférents et qu'ils nous haïssent. C'est évidemment complètement faux (écrit-elle avec les bras de part et d'autre d'une créature noire comme l'enfer installée entre le clavier et la femme, obligée, par un lever de tête, de déposer un bisou entre ses oreilles velues toutes les 7 à 9 secondes). Je tiens, à l'origine, de Moukmouk, un grand faux ennemi des chats à qui je pense toujours beaucoup[1], que les chats ont inventé un langage pour nous parler.

En effet, les chats ne miaulent pas entre eux, dans la nature. Ils miaulent exclusivement à destination des humains, dans une tentative parfaitement loupée d'imiter notre langage. Certes, vous pourriez me dire qu'ils ont inventé le miaulement pour nous insulter et nous menacer, mais sérieusement, qui se donnerait la peine de développer un langage entier et sa grammaire uniquement pour ça ? Ecoutez-les, leurs miaulements, leurs modulations, ceux qui montent, ceux qui descendent, les petits, les rauques, les miaulements pépiements du chat qui vous raconte sa journée quand vous rentrez le soir, vous verrez, ils nous imitent. Mal, mais ils nous imitent.

Bref.

J'ai dit que je raconterais l'histoire de la chatte et du terre-neuve. Pour ceux qui ne connaissent pas ces chiens merveilleux, ce sont de grosses bestioles très poilues qui sentent le suint et bavent 10 litres par jour et pèsent facilement 60, 70, voire 80 kilos. Ils adorent nager, être copains avec nous. Ils sont furieusement têtus, ont une dignité majestueuse (jusqu'au moment de plonger dans une flaque de boue), sont extrêmement gentils et fidèles ; ceux que j'ai fréquentés ont été les meilleurs amis chiens de ma vie.

Quand j'étais ado, on en avait un avec qui la chatte de la maison s'entendait très bien. Ils vivaient en paix, en harmonie et en duo de malfaiteurs associés pour ce qui concerne le vol de bouffe. Ils se partageaient sereinement l'affection de leurs humains ; la vie nous était paisible et tendre.

Un jour, la chatte s'est relevée enceinte (pas du chien). Et comme son copain énorme était l'être en qui elle avait le plus confiance sur la Terre entière, elle a mis bas entre les énormes papattes du clébard. Qui n'a pas bronché pendant des heures. Il a bien fallu déménager les chatons (sous l'escalier qui menait au deuxième étage, un lieu sombre et calme, idéal pour la veille attentive de sa portée). Je ne sais combien de fois par jour, on trouvait le chien tête sous l'escalier, à vérifier que les chatons allaient bien, prenant son tour de veille pendant que la chatte allait manger, faire ses besoins et autres activités de mère chat.

En arrivant sur le palier on voyait seulement le corps du chien, son énorme cul et sa queue remuant de fierté d'avoir de si mignons enfants. Car oui, il était manifeste que le chien, défiant toutes les lois de la biologie, se considérait comme le père des chatons. C'est contreuh-naturinh ? Rien à foutre.

A ce jour je suis toujours émue par ce pacte d'amour total entre ces deux-là.

Bref again.

Ce n'est pas du tout l'histoire que j'avais promis de raconter.

Quelques années plus tard, nous avons adopté une chatonne mi angora, mi chatte des rues. Une magnifique écaille de tortue, d'allure un peu précieuse. Le chien, le même, s'est tout de suite proposé comme père d'adoption. La chatonne a dit oui. Le chien était sur ses vieux jours, elle lui a survécu longtemps mais a détesté avec constance les chiens suivants de mes parents : ils n'étaient pas Lui. Et toute sa vie, cette adorable demoiselle au poil long et doux a marché en roulant des épaules comme un vieux docker. Comme son papa chien.

Ces souvenirs me font monter le sourire aux lèvres et la larme à l'œil.

Alors bon, que vous aimiez ou pas les chats, les chiens, vous faites bien comme vous voulez. Mais ne vous mêlez pas d'essayer de savoir ce qu'ils ont dans le cœur, vous vous y perdriez. Après tout, c'est peut-être la meilleure chose qui pourrait vous arriver ?

Note

[1] Les derniers billets de son blog ont été écrits par une de ses amies pétillantes, merci à elle de ces récits qui le font vivre encore un peu.

lundi 4 novembre 2024

Mon chat est donc un génie du trollage

Or donc, après avoir mis des mois à apprendre à passer par la chatière, mais à avoir compris très vite comment tirer un tiroir pour y pêcher le jouet convoité (et le sachet de friandises), ObiWan a un nouveau tour qu'il réalise de papatte de maître.

Il a compris comment, à coups de pattes toniques et répétés, sortir la partie qui ferme la chatière quand je veux maintenir ma chambre hermétiquement fermée.

Le hic c'est qu'en forçant comme un tordu, il peut entrer (ladite partie est alors bloquée du haut mais pas du bas), mais pas ressortir.

C'est ainsi que je l'ai trouvé, allongé sur mon lit, triomphant, en rentrant chez moi (et oui je l'avais bien enfermé HORS de la chambre en partant).

La bonne nouvelle c'est qu'il n'en a pas profité pour pisser sur mon lit.

La mauvaise c'est qu'il va falloir que j'upgrade le dispositif.

C'était reposant, ces vacances, à ne pas lutter contre cet escroc de haut vol.

vendredi 1 novembre 2024

Le ridicule ne tue pas, il donne juste l'air con

J'ai, au chapitre de mes nombreuses névroses, la crainte à peu près quasi constante de tomber. Il faut dire je prends la gravité très au sérieux et que mon sens de l'équilibre n'est pas tellement un allié. Dans toute situation, donc, j'imagine le million de possibilités de contempler mon cerveau répandu sur le sol.

On apprend à vivre avec. Il faut, sinon on ne sortirait pas de chez soi, que dis-je de son lit.

Mais dans le cadre hors quotidien, ça peut être un peu chiant. Surtout quand on aime à la folie certaines choses (être en bateau) mais que pour être SUR le bateau il faut passer PAR une étape qui craint et que la majorité de l'humanité fait sans même y pense : passer du quai au bateau. Vous la voyez, ma tête écrabouillée entre la coque et le quai, prête à être dévorée par la faune aquatique ? Non, hein ? Moi oui. A chaque putain de fois.

Parfois c'est facile à surmonter, parfois pas du tout.

Ajoutons à ça un genou gauche qui a pris un sale coup il y a dix ans. Malheureusement mon médecin de l'époque était plus occupé à me reprocher les gâteaux (que je ne mangeais pas) qu'à soigner mon genou (qui douille toujours au pliage). Résultat des courses, j'ai mal en descente, parfois en montée et je ne peux plus sauter. Et oui, j'ai changé de médecin, qu'il aille se faire cuire le cul en enfer ce bâtard.

Additionnons : peur irrationnelle de la chute + motricité et équilibre contestables + mal au genoux et historique lourd d'entorses aux chevilles = dès qu'il faut monter quelque part, et pire encore en descendre, j'ai un gros coup d'arrêt mental. Non ma vieille, ça n'en vaut pas la peine.

Fort heureusement, je suis plus têtue que moi et dans l'immense majorité des cas, je me fais une raison et j'y vais (mais j'ai peur, mais j'y vais). Et la nette conscience qu'il y a des choses que je ne ferai jamais. J'ai définitivement assumé que non, le saut à l'élastique, c'est pas pour moi et que je n'ai aucune envie de tenter le dépassement de moi par ce biais-là. Tant pis.

Il me reste alors à en découdre avec l'image que je me fais de moi, vieille grosse dame qui bouge comme un pachyderme bourré un peu ridicule, beaucoup pathétique. Grosses conversations avec ma saboteuse intérieure pour lui dire que si ça fait marrer quelqu'un, ben tant mieux, un rire n'est jamais vain. Et que celles et ceux qui me jugeraient n'ont qu'à enfiler à ma place cette liste de contraintes chiantes, on en reparle à la sortie.[1]

Un vrai boulot de déminage, presque à chaque fois.

Mais aussi un petit moment de célébration quand ça a valu la peine.

Note

[1] Ce poids de l'injonction paradoxale dans notre vie d'enfants : on est pas supposé tenir compte de l'avis des autres mais "ma pauvre, tu es vraiment ridicule". Allez vous faire foutre, les fantômes.

mardi 22 octobre 2024

J'ai encore perdu mon crâne qui fume

Je sais, c'est futile, par rapport à certains autres de mes soucis, mais allez savoir sur quoi les choses vont se cristalliser.

Je viens de me souvenir pourquoi j'avais arrêté de porter badges et pins, il y a quelques décennies.

Le taux de perte est effarant.

J'ai dû changer de blouson en jean (alors que le précédent avait à peine douze ou treize ans, c'est un scandale), et sur le nouveau, je ne sais pas ce qu'il se passe mais les pins se détachent et, quand je m'en rends compte, la plupart du temps, il est trop tard.

Au registre des pertes douloureuses, il y a mon adoré crâne qui fume de Van Gogh. Je l'avais déjà perdu et une super chouette meuf sur Twitter m'en avait rapporté un du musée Van Gogh à Amsterdam, où elle allait justement.

J'adore ce pins. Je ne sais pas pourquoi lui plus qu'un autre, mais je l'adore et je suis triste de l'avoir perdu.

Dans une vie parfaite, il y aurait un amoureux formidable dans ma vie qui me dirait "viens, on saute dans le train, on passe le week-end à Amsterdam, on ira saluer Vincent et on rachètera ton pins, mon amour".

Je suis sûre que ce type existe, peut-être dans une réalité alternative. Mais dans ma vie à moi, celle d'où je vous écris, non (enfin à part Cro-Mi à qui je l'ai dit vous êtes les premiers au courant, mais même vous considérant informés, je crains que ça ne suffise pas).

Du coup j'ai retiré beaucoup de mes badges et pins. Il m'en reste juste assez pour que Lomalarchovitch me dise que sur trois, il y en avait deux sur lesquels le mot fuck était écrit. "Je ne suis pas une mère très polie, que veux-tu", lui ai-je répondu.

C'est con, ça me rend un peu triste alors que bon. C'est de la verroterie, ça n'est pas grave, c'est un détail.

Où vont se nicher la peine et la rage au bide, donc.

mercredi 16 octobre 2024

Enfiler l'armure à nouveau

Voilà.

On a à peine le temps de se poser et de se dire que là, tout va plutôt bien, qu'on s'en prend à nouveau une sur la tronche.

A peine l'idée que la rentrée en sixième, malgré son lot de roumègueries à cause du caractère trop organisé de mon fils, ne se passe pas si mal que la nouvelle tombe.

Lomalarchovitch a deux abrutis sur les côtes depuis plusieurs semaines.

C'est passé de remarques blessantes à insultes, des insultes aux coups. Et comme ces abrutis sont malins et que Lomalarchovitch se défend, c'est lui qui se fait punir. Feu vert du collège au harcèlement : les petits cons sont bien tranquilles, celui qui subit, même s'il n'est pas innocent de ses ripostes, a des ennuis.

J'ai été bonne élève, j'ai suivi leurs consignes : premier signalement à l'équipe de médiation il y a trois semaines. Redite en réunion avec le prof principal la semaine dernière. Message à ce dernier + la CPE + l'équipe médiation hier : rien n'a bougé.

En attendant, fiston va au collège bien stressé, fait donc : n'importe quoi. Et on me propose une commission éducative pour l'aider à gérer ses émotions.

Alors je ne suis pas contre mais c'est comme la fille à qui on reproche sa jupe trop courte et d'avoir cherché les ennuis : si on commençait par LE problème ?

Est-ce qu'on ferait mieux que lui, nous, adultes, si on prenait des remarques humiliantes, insultantes et/ou des coups tous les jours ? Je ne crois pas, non.

Je documente, archi consciente que ça va être difficile (la CPE hier m'a appelée et la seule réaction à mon message du matin était : "on a des problèmes de violence exceptionnels cette année, même les sixième ont intégré la violence physique et verbale comme moyen de communication acceptable". Super rassurant. Mon fils était à côté d'elle quand elle parlait... Aujourd'hui ? Elle ne travaille pas.) Ce matin j'ai pris des photos de bleus sur son corps, au cas où.

Je ne blâme pas le collège lui-même, l'école publique n'est plus que le fantôme de ce qu'elle a été, il manque des heures, des gens, des euros partout. Je blâme le monde qui fait qu'on en arrive là.

Et je me retourne dans mon lit à longueur de nuit en espérant trouver la solution miracle qui n'existe pas. Seule ou à peu près.

Je vais fermer les commentaires sous ce billet. Je n'ai pas envie d'en discuter ici, à vrai dire, j'ai envie d'effacer le problème. Là j'ai juste besoin qu'on me prenne dans les bras et qu'on me rappelle que j'ai encore de la force pour gérer ça, et où je l'ai rangée. Et qu'on va trouver des solutions. Qu'il va aller bien. Que ça va s'arrêter. Et que je suis une adulte bienveillante qui ne peut pas aller péter des genoux à des gamins qui s'en prennent à mon fils malgré l'envie qui me démange.