A quoi reconnaitre son train quand on monte dans une rame au hasard

Les habitués de la ligne J prise de la gare Saint-Lazare en direction d'Ermont-Eaubonne le savent bien : les trains sont annoncés très tard, particulièrement en heure de pointe.

Quand le boulot a déménagé et que j'ai recommencé à prendre les transports en commun, il y a bientôt deux ans, j'étais fascinée par une espèce particulière de voyageurs.

Bien avant l'affichage de la voie, ils prenaient, d'un air décidé, la direction d'un quai en particulier et s'installaient dans le train, l'air de rien. Comme s'ils étaient les gardiens d'un secret bien gardé.

Je les enviais un peu, consciente de mes limites : je suis capable de me plonger dans la lecture et de me rendre compte, train déjà lancé vers sa première étape, que je ne suis pas dans le bon.

Je les ai observés de près. Ai tenu une liste mentale des correspondances entre horaire du train et quai de départ (relativement fiable mais pas complètement non plus). J'ai cherché des martingales sur les affichages latéraux des trains, la tête des gens qui l'attendaient, etc.

Presque deux ans d'entraînement intensif plus tard, il m'arrive assez souvent de prendre place dans un train avant que sa destination ne soit connue. Par élimination (type de train, plage de voies possibles, juste arrivé ou déjà vide, zone violette ou verte, etc), un peu d'instinct, je me prends à ce jeu avec eux.

J'ai toujours un petit frisson aventurier, quand je fais ça ; une fois je suis descendue persuadée d'avoir tort et me suis fait piquer ma place assise, alors que j'avais raison (à ma décharge la liste des stations desservies était exotique).

Il y a un facteur qui s'ajoute et qui ne s'acquiert qu'avec l'expérience : la tête des habitués. Oui, la dame avec la canne qui s'assied toujours à cette place va là où je vais. Ah, la dame qui tient toujours l'ascenseur à la gare du Stade est là, c'est bon. Oh, je le connais ce gamin à la magnifique tignasse bouclée. Etc.

Quand je reconnais une tête d'habitué, je replonge le nez dans ma lecture en cours et mon attention se relâche. Au moins je ne serai pas seule si on se retrouve entre égarés à une destination qui n'est pas la nôtre. #AirRésolu

Commentaires

1. Le lundi 10 février 2025, 15:32 par Laurent

Que s'apelerio la débrouille mais avec davantage de poésie dans la recherche

2. Le lundi 10 février 2025, 15:38 par Sacrip'Anne

Laurent oui, ou une très parisienne impatience face à l'attente des transports. Ou un mélange de tout ça !

3. Le lundi 10 février 2025, 17:52 par Matoo

Mais t'es une WARRIOR !!!!! Jamais j'oserai faire ça moi. :DDD

4. Le lundi 10 février 2025, 18:07 par Sacrip'Anne

Matoo huhuhu. Écoute, j'arrêterai le jour où je me planterai de destination, hein.

5. Le mardi 11 février 2025, 00:28 par gilda

Le fou-rire grâce à la dernière phrase de ce billet !
En tant que voyageurs descendant à la gare de Clichy-Levallois, notre tracas fut longtemps non pas tant de monter dans le bon train que de monter dans un train dont le conducteur n'oublie pas de marquer l'arrêt. Il fut un temps où ça arrivait souvent et bim on se retrouvait à Asnières (alors que Pont Cardinet n'avait pas été oublié et que notre arrêt était bien annoncé).

6. Le mardi 11 février 2025, 08:47 par Sacrip'Anne

Gilda, je sais, ça a été ma gare pendant 5 ans ! Mais comme j'allais bosser à pieds, ça ne m'arrivait que pour des retours "loisirs" et je n'avais pas d'enfants, donc moins stressant ! (Confidence, le hashtag final a été écrit en pensant à toi)

7. Le mercredi 12 février 2025, 10:04 par Créatinine

Je prends le train, ligne L depuis plus de vingt ans. Parfois la J, si la L est en travaux, et que tout s'arrête à Bécon. Je découvre cette pratique avec intérêt. Sur la L, on en est plutôt à conjecturer : "Quai 5 ou 6 ?". Et à suivre le quidam le plus réactif dès indication au tableau.

Au sujet du droit à l'image, évoqué récemment dans un autre texte : j'ai appris hier que les gares parisiennes, les quais de Seine, les jardins publics de Paris, la place du Trocadéro, les cimetières, les marchés et d'autres lieux étaient des lieux privés... soumis à des redevances pour le photographe qui pose son trépied dans le coin. Par ailleurs, des demandes d'autorisation de photographie se font sur Paris film, 5 jours avant prise de vue, en ligne, pour tout photographe immortalisant les lieux publics parisiens (la chaussée, les trottoirs... il ne reste finalement plus que ça!). Ça, c'est côté lieux.
Maintenant, côté sujets, tout individu mitraillé par le photographe doit avoir signé un contrat tendu par ledit artisan, dans lequel la star grandissante accorde son droit à l'image.
Dur, dur.
Pour avoir la paix, la solution serait d'apprendre le ouolof ou le coréen dans les plus brefs délais, car les agents agissant sur la place du Trocadéro ne chercheraient pas de crosses aux photographes étrangers, les palabres étant trop complexes...
Je réalise que je ne suis pas née à la bonne époque.

8. Le mercredi 12 février 2025, 11:08 par Sacrip'Anne

Créatinine la L m'est quasi terra incognita ! Quant au reste : on aurait jamais de traces illustrant la vie à une époque si personne n'avait pris de photos. Moi c'est carrément de monde, que je me suis trompée.

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