L'âge est un sujet de conversation qui passionne les foules. On est toujours trop vieux ou trop jeune pour : quelque chose, les autres, faire bien, faire mal, être à temps, en profiter, dire au revoir.
J'observe mon entourage avec gourmandise. Les gamins pressés, intenses, brûlant d'en découdre. Les à peine trentenaires qui se plaignent que c'est plus pareil, qu'ils ont mal, qu'ils sont raides. Celles et ceux qui virent quadra et qui ne s'en remettent pas, qui ont l'impression que leur heure a sonné, qu'ils sont périmés. Les plus vieux aussi. Ceux qui sont tellement eux, depuis toujours que les rides et défaites du corps ne changent rien. Ceux qui glissent dangereusement vite sur une mauvaise pente et ne s'en rendent pas compte (ou refusent cette idée avec violence)
Et moi ? Jusqu'à présent, je trouve que vieillir est un signe de santé suffisamment bonne pour en être arrivée là.
Je regrette un peu d'avoir détesté tant mon corps quand il était encore vigoureux et plein de promesses, curieusement celui de maintenant, je suis plus en paix avec.
J'éprouve une grande joie à savoir qui je suis, ce que je veux, ce que je ne veux plus. Je me sens tellement plus libre d'être, dans ma tête, dans mon cœur. Je ne me sens plus obligée de suivre un chemin qui n'est pas le mien ; l'économie à part, les enfants ayant faim trois fois par jour. Ce matin, en allant de mon bureau de la maison à la cuisine, j'ai souri en direction du soleil qui se levait et faisait une lumière dorée dans mon salon. Sereinement, paisiblement, entièrement heureuse d'être là au bon moment pour la voir.
A quelques détails près, j'aime beaucoup ma vie maintenant. Je me glisse sous la couette, le soir, heureuse.
De ma liberté. De traverser cette période houleuse et difficile sans lâcher le cap, sans oublier de savourer tout ce que j'ai trouvé de bon sur le chemin. Comment dire ça sans sembler ridicule (bon, en même temps, je m'en fous), mais dans mon coin de banlieue pas classe, dans mon appart pas incroyablement beau, je suis bien, je suis à ma place. Mes derniers regards de la journée sont pour Paloma la superbe (plante verte) et mes bouquins, les chats vibrent sur mes pieds, les enfants vont bien, ils sont juste à côté, on a ri, encore. Quels millions achèteraient ça mieux que ça ? Combien de temps ça m'a pris pour savoir que ça valait l'infini, cette vie banale et unique ?
J'aime cette façon qu'on a, aussi, en vieillissant, de ne pas vraiment changer, au contraire, de se retrouver un peu, tout en découvrant sur soi des choses qui apaisent.
Cette année, j'ai commencé à apercevoir une forme de sérénité. De joie profonde à savourer ce qui est et que personne ne peut me retirer. Une faculté qui émerge à arrêter de me blesser moi même, aussi. Il y aura des remerciements à donner ; le chemin, ses obstacles et les gens sur la route n'y ont pas été pour rien.
Et oui il y aura d'autres moments difficiles, non je ne suis pas encore sortie du trou, mais il y a ça, cette dimension nouvelle que je savoure et qui me console de bien des choses.
Commentaires
:-)
Approche similaire que j'ai du mal à transmettre à mon épouse... Je regarde ce que je voulais faire et vivre et je me dis que c'est déjà très bien pour ce terrien que je suis. Rien d'extravagant non plus et parfois le cors rappelle l'age, la vie rappelle ses petits soucis ... Et pourtant j'ai appris pendant la phase du 4 à me contenter de ces petits bonheurs et d'une sorte de routine un peu chaotique tout en allant encore de l'avant.
Derrière cela, la perception aussi de ne pas être immortel...et que c'est bien comme ça.
Au plaisir de relire d'autres mots comme ceux là.
Moi ça me casse les couilles de décrépir comme ça. Mais j'accepte, bon an mal an, la sentence qui s'aggrave tous les ans. Après je suis du genre à me dire qu'il y a des avantages et inconvénients à chaque situation, et l'âge est un facteur qui obéit très bien à cela. C'était cool d'être jeune, et à d'autres égards cool d'être vieux. @-I @-I @-I
Franck 😘
Didier à la décharge de ton épouse on fait payer cher aux femmes de ne plus être jeunes. Mais de toute façon, ça n'est pas comme si on pouvait repartir en arrière. Merci !
Matoo c'est là, autant en faire le meilleur usage. Et puis tu as toujours ta bouille de gamin, toi !
Ah moi j’adore vieillir et à la retraite, « je vis ma meilleure vie » ! Il faut dire qu’avec mes hanches en titane, j’ai acquis « la marche illimitée » alors je ne me sens pas amoindrie mais augmentée.
Et puis je me sens plus sage, je regarde la marche du monde avec une certaine distance, en revanche je me concentre sur ceux et celles qui sont autour de moi, chacun.e est un petit monde et j’adore découvrir.
Bref vieillir c’est chouette. Tout ça est très passager, un jour tout s’arrêtera, alors savourons savourons les jours de notre vie.
Passé 50 balais, le plus difficile pour moi ce sont les bobos, les douleurs du corps. Lesquelles viennent de la menaupose, du traitement post cancer ou de la vieuserie ? Je ne sais. Les plus ? Je ne sais pas si je suis plus en paix, j’ai d’autres affres que plus jeune, mais quand même, le sentiment que la vie m’a appris des trucs, rien que ça déjà c’est pas mal hein 😉
Ah Sylviequelle joie de te lire ici (et de te savoir aussi heureuse) ! Je t'embrasse fort !
Luceluciole l'ineffable satisfaction d'avoir l'impression d'avoir pigé un truc ! Ma came ! ❤️😘
"...mais entièrement heureuse d'être là au bon moment pour la voir" cette phrase... quel plaisir de lire une telle phrase toute simple, ce n'est pas si évident de décocher une phrase emprunte de tant de lucidité dans une société où il est si "naturel" de se vautrer dans le regret et la plainte continuelle, bravo.
(et c'est naturellement valable pour l'ensemble de ton texte)
Bleck
Vieillir, c'est désolant, c'est insupportable,
C'est douloureux, c'est horrible,
C'est déprimant, c'est mortel.
Mais j'ai préféré «chiant»
Parce que c'est un adjectif vigoureux
Qui ne fait pas triste.
Vieillir, c'est chiant parce qu'on ne sait pas quand ça a commencé et l'on sait encore moins quand ça finira.
Non, ce n'est pas vrai qu'on vieillit dès notre naissance.
On a été longtemps si frais, si jeune, si appétissant.
On était bien dans sa peau.
On se sentait conquérant. Invulnérable.
La vie devant soi. Même à cinquante ans, c'était encore très bien….Même à soixante.
Si, si, je vous assure, j'étais encore plein de muscles, de projets, de désirs, de flamme.
Je le suis toujours, mais voilà, entre-temps j'ai vu le regard des jeunes…
Des hommes et des femmes dans la force de l'âge qui ne me considéraient plus comme un des leurs, même apparenté, même à la marge.
J'ai lu dans leurs yeux qu'ils n'auraient plus jamais d'indulgence à mon égard.
Qu'ils seraient polis, déférents, louangeurs, mais impitoyables.
Sans m'en rendre compte, j'étais entré dans l'apartheid de l'âge.
Lutter contre le vieillissement c'est, dans la mesure du possible, ne renoncer à rien.
Ni au travail, ni aux voyages, ni aux spectacles, ni aux livres, ni à la gourmandise, ni à l'amour, ni au rêve.
Rêver, c'est se souvenir tant qu'à faire, des heures exquises.
C'est penser aux jolis rendez-vous qui nous attendent.
C'est laisser son esprit vagabonder entre le désir et l'utopie.
Nous allons prendre notre temps.
Avec l'âge le temps passe, soit trop vite, soit trop lentement.
Nous ignorons à combien se monte encore notre capital. En années? En mois? En jours?
Non, il ne faut pas considérer le temps qui nous reste comme un capital.
Mais comme un usufruit dont, tant que nous en sommes capables, il faut jouir sans modération.
Voilà, ceci est bien écrit, mais cela est le lot de tous, nous vieillissons !...
Bien ou mal, mais le poids des ans donne de son joug au quotidien
Merci beaucoup, Bleck. Hier, j'ai écrit à quelqu'un que j'admire immensément et qui ne lira probablement jamais ce mot que parfois, la simplicité est ce qu'il y a de plus difficile. Raison de plus pour l'attraper au vol !
Cinabre ça ne lui a pas réussi ! Disons que je n'en suis pas là (et pense moi à te raconter le jour où ma grand-mère est passée "chez Pivot !!)
Chaque âge a ses plaisirs dit un proverbe et c'est plutôt vrai cette formule je trouve.
Profite du tien et engrange surtout les souvenirs pour la suite.
Je comprends tout à fait cette sérénité et ce sentiment de se trouver à la bonne place au bon moment, c'est quelquefois un peu trop fugace alors il ne faut pas laisser passer ce que ça apporte comme bien-être.
J'ai découvert ce blog aux urgences de Colombes, une nuit. J'ai compris que son auteur vivait tout près et ça m'a amusée. Je suis revenue ce soir, et, tombant sur ce texte, j'ai savouré, retrouvant bien des pensées personnelles dans ce bonheur assuré par les petits riens. Merci pour tout.
Madleine je pense que les deux dernières années, en matière d'impirmanence, de fugacité et de savourage du bien qui passaient, étaient un bon rappel, si jamais.
Creatinine merci ! J'y passe un certain temps entre accouchements, crises d'asthme, entorse et abandon de vésicule biliaire, dans cet hôpital, si ça se trouve on y a été simultanément !
Peut-être faut que je regarde dans le dico… il ya un mot que je comprends dans ton billet… comment tu dis déjà ? Age ? C’est ça ? Avec un chapeau sur le A ? Ok je vais voir…
(2 minutes plus tard)
Ok, je suis allé voir. J’aime pas. Voilà.
Sympa ce billet ! Le temps, l'âge, ...
Un côté alambic du temps, pour ma part, j'arrive sans peine à distiller le temps, le moment, à l'apprécier. Mon côté contemplatif sûrement, et une lecteur assumée. Je ne sais pas si c'est de la sérénité, plutôt une manière d'être.
Vieillir, je suis toujours "surpris" dans mon entourage amical de déceler de l'angoisse, une peur de vieillir. Le genre de truc dont je ne m'occupe pas, ça se fait tout seul ;-)
Bise.
Orpheus viens, on va manger une pizza.
K ça fait longtemps que ça me surprend, surtout chez les femmes jeunes, cette angoisse, mais quelque chose me dit qu'elles ne se la sont pas mise en tête toutes seules. Bises !
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