Dans la grande famille des maladies chroniques, il y en a des plus chiantes que d'autres. J'ai du bol, la mienne s'oublie plutôt bien quand tout est calé. Quand elle se rappelle à moi, je fais moins la maline, mais 90 % du temps on se fout la paix, modulo un pauvre comprimé quotidien pour le reste de mes jours et les contrôles à faire, un peu contraignants mais pas au point de s'en bouffer la vie.
Depuis quelques mois, elle est en mode attention whore.
Depuis quelques mois, je vis donc sur une énergie que je ne possède pas. Je me fournis, à crédit, un peu dans la rage de vivre, un peu dans un entêtement (futile ?) à fabriquer autre chose que du noir.
D'ailleurs ça fonctionne, globalement. Je revois des couleurs au fil des bulletins de santé insolents, des rires, des amis, des moments qui font du bien, passés ou à venir.
Le problème du crédit, c'est toujours les intérêts. Il n'y a pas grand chose de gratuit en ce bas monde.
Chez moi les intérêts ça se paye avec un système immunitaire qui a décidé de jouer au contrôleur de gestion. On dirait que pour me forcer à récupérer un peu, il a vendu son âme au premier virus qui passe, roulé des pelles[1] à toutes les jolies petites bactéries sexy qui se trémoussent sur son chemin.
Il y a dix jours je me suis retrouvée clouée au lit par la crève que tout le monde se traine. 24 heures sous la couette. Là, je recommence (chats à l'appui, ils me veillent comme si mon trépas était prévu pour dans 12 minutes) à cause du tacos de retour de Cro-Mi. J'en avais même pas envie, de ce tacos, en plus, j'en ai pris un petit, des crudités avec parce que c'était plutôt ça dont j'avais faim, et j'étais pas arrivée à la dernière bouchée que je SAVAIS que ça allait mal tourner.
Il faut prendre les choses avec humilité. Si jamais, quand vous exultez de vous sentir en vie, vous êtes pris d'un léger sentiment de surpuissance, ces moments, en plus de vous forcer enfin à vous (re)poser quelques heures, vous mettent une petite claque derrière la tête pour vous rappeler votre triste condition humaine.
Il faut prendre les choses avec humour [2], mais aussi avec rationalité. Oui c'est inconfortable, très. Mais pas mortel.
Alors je lis dix pages, je dors trente minutes, je me réveille et tente, face à une vague douloureuse, de chercher à savoir si ça fait assez mal pour valoir la peine de me lever et me faire un Smecta de l'enfer ou pas. (Oui, j'ai fini par craquer). On recommence le cycle jusqu'à l'heure de dormir plusieurs heures d'un coup. Ou disparition des symptômes.
On médite sur le fait qu'on réfléchira à prendre un rythme plus serein, peut-être, mais pas la semaine prochaine qui est bien chargée, ni celle d'après.
On pense à ce qui fait du bien, on se laisse traverser, on paie gentiment les intérêts. Et dès qu'on peut on bondit sur ses pieds pour aller d'un pas (lent mais) déterminé vers la prochaine aventure.
Notes
[1] Réjouissons-nous, au moins l'un de nous deux embrasse quelque chose
[2] Enfin peut-être pas quand le coloc vient ouvrir la porte en grand sur votre corps à moitié nu pour vous dire que c'est l'heure de manger, sans frapper, alors que vous avez déjà signifié que vous êtes malade, que vous voulez qu'on vous foute la paix et que la moindre mention de bouffe vous envoie un spasme abdominal assorti d'un début de nausée. Là vous avez le droit de grogner, en tout cas je l'ai pris.
Commentaires
C’est pas fun, mais c’est fort joliment dit.
Gros câlin de soutien moral.
Et prends soin de toi quand même.
Bisou
Oui, promis, Orpheus. ❤️
Tu viendras tout de même demain, même un tipeu ?
Franck si demain = lundi, mais oui, évidemment !
Oui c'est ça, demain lundi, comme j'ai dit … pouf pouf je sors :-p
Franck c'est la magie d'habiter en vacances, ça !
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