I'm a million years old and I'm made of emptiness.
lundi 13 octobre 2025
« Oui, je sais très bien, depuis longtemps, que j’ai un cœur déraisonnable, mais, de le savoir, ça ne m’arrête pas du tout. » (Colette)
lundi 13 octobre 2025
I'm a million years old and I'm made of emptiness.
vendredi 10 octobre 2025
On les avait vus en première partie de Nick Cave à Bercy l'an dernier avec S., on les a revus hier soir en tournée avec leur dernier album.
Black Country, New Road, c'était un premier contact un peu fou et le sentiment qu'une salle plus intime leur irait encore mieux.
Un album foutraque et charmant. Ils ont du temps pour en faire des tout aussi charmants et peut-être un petit peu moins foutraques.
Un concert hier beaucoup plus recentré, mélancolique, avec une dernière demi-heure à vous coller au plafond d'émotion.
En première partie : Westside Cowboy, pas toujours super en place mais on aime ne pas leur résister.
Et les premières photos de concert "en intérieur" avec mon p'tit Leica.
lundi 6 octobre 2025
Il m'a fallu 35 ans pour comprendre pourquoi j'étais violemment heurtée par l'injustice alors que ça faisait à peine soulever une épaule à la plupart des gens. Encore quelques-unes de plus pour comprendre que notre moteur à émotions ne tournait pas au même régime. Il paraît que c'est spectaculaire, vu de l'extérieur. Mon normal étant mon normal, ça ne l'est pas de l'intérieur. C'est comme ça que je vis, depuis toujours.
Avec une grosse dose d'honnêteté vis-à-vis de moi. Ça ne m'a pas empêchée de me planter dans les grandes largeurs, et de me raconter des conneries pour que cette erreur soit tenable... jusqu'à ce qu'elle ne le soit plus.
J'ai envie que mes personnes préférées se sentent, à mes côtés, autorisées à être qui elles sont. Sans mensonges, sans peurs.
Je crois que c'est plutôt réussi du point de vue de mes enfants. Dommage, c'est maintenant que je doute : ai-je bien fait ? Ne vont-ils pas se faire démonter la tête par le monde ? J'espère que non, j'espère que je les ai aidés à construire des fondations solides sur lesquelles ils construiront leur liberté d'être, de penser, de sentir, toute leur vie.
J'ai espéré être une amie à qui on peut dire "ça ne va pas" sans honte. Une amie qui nomme quand c'est nécessaire et ferme sa gueule quand elle peut. Au sens de : ne pas expliquer aux autres comment ils devraient vivre leur vie. Vouloir leur montrer, à tout prix, ce qu'ils sont assez grands et intelligents pour voir. Quand ils voudront / pourront. À part s'ils demandent.
Je crois profondément qu'il est indispensable d'aller vraiment mal, parfois, et de le sentir passer pour être un humain fonctionnel (je ne parle pas de pathologies, je parle de savoir la vie, ce qu'elle coûte et ce qu'elle offre).
À voir le nombre de mes amis qui me prennent pour une cinglée à cause de ce que je lis ou vais voir ou accepte de ressentir, c'est un échec partiel. À voir le nombre d'entre eux, qui, avec les meilleures intentions du monde, m'expliquent ce que je ne vois pas et qui va me faire mal, en ne réalisant même pas à quel point ils nourrissent ma Bavarde et m'ajoutent du boulot de résistance à l'autosabotage, c'est un échec aussi. Et vraiment, vraiment, je ne doute pas de leur bienveillance à mon égard. Juste, ils font par rapport à eux et pas par rapport à moi. On aime comme on peut.
Ne parlons pas trop de vie amoureuse. J'aurais adoré qu'un homme se sente libre d'être un être sensible à mes côtés. De sentir pleinement, intensément, sans que ça lui enlève quoi que ce soit. Un homme qui vienne me rencontrer et se rencontrer en même temps, d'une certaine façon. Et pour qui mes émotions sont un cadeau et pas un fardeau.
Bon.
Les gens sont terrorisés par les émotions.
J'ai renoncé à pouvoir être auprès d'autres celle qui vit sans se cacher. C'est un énorme échec pour moi. Balek. La vie.
Je ne peux pas réécrire mon chemin, ni celui de ceux qui ont croisé ma vie. Elle est insignifiante, ma vie, la même que celle de bien des gens. Je croyais avoir cette richesse à offrir comme une singularité... loupé. Je tiens plus de l'épouvantail que du miroir aimant, faut croire. C'est ainsi.
Je n'en reste pas moins agacée (euphémisme gentillet) par le discours ambiant sur la sensibilité, la gestion des émotions, blablabla. Bien sûr qu'on ne peut pas se rouler par terre en hululant ses pleurs passé un âge somme tout assez jeune. Bien sûr qu'il faut laisser de la place à toutes et tous.
Mais aussi : nos émotions sont ce qui fait de nous des humains, uniques, sensibles, accessibles à la nuance, à la quête d'une forme d'équilibre entre grands et petits bonheurs, grands et petits malheurs. Alors oui, on peut avoir peur. On peut se terrer dans un coin confortable et attendre que ça passe.
Que ça plaise ou non, ça ne sera jamais mon choix.
Je ne l'impose à personne, je ne vois pas au nom de quoi je rassurerais le monde en adoptant les leurs.
vendredi 19 septembre 2025
Il y a quelques jours, je m'élançais hors de chez moi ravie de la journée qui commençait : j'avais un déjeuner programmé avec il mio fratello Orpheus.
Sauf que le bus s'annonçait au bout de la rue et que la première chose que j'ai faite hors de chez moi, c'était d'empoigner ma robe bleue (forcément, quand on voit Orpheus, on s'habille en bleu) et de piquer un sprint[1] pour l'attraper au vol. Il ne sert presque à rien, ce bus, quelques arrêts pour aller au métro, mais le presque est d'importance. Et j'aime bien arriver dans Paris en métro, histoire de maudire un certain bar juste à la sortie, bref, c'est une toute autre histoire.
C'est donc en courant que je me suis rendu compte que la journée allait être plus compliquée que prévue, j'ai senti ma culotte irrésistiblement prise par l'envie de descendre le long de mes jambes. Non pas qu'un beau mec soit en vue immédiate, non, elle n'en est pas rendue à ce point. C'est juste la plus ancienne d'une série d'un modèle similaire dont l'élasticité s'est bonifiée avec l'âge et l'usage, disons.
J'ai donc empoigné, avec le plus de grâce et d'élégance possible (pas beaucoup, donc), la culotte à travers la robe.
Car. Détail important.
Cette robe a l'air parfaitement respectable vue de face. Elle est longue, elle est bleue, elle est jolie, en tout cas je la trouve jolie et j'aime être dedans.
Sauf que, la fieffée chipie, est beaucoup moins respectable de côté. Par souci d'économie de fil, probablement, le concepteur a imaginé des fentes à la place de coutures latérales, le malheureux. Des fentes qui remontent jusqu'à 10 bons centimètres au dessus du genou (enfin des miens, pour les autres, je ne sais pas). Donc, de face, bleu et élégance. De côté, de la jambe découverte dès que je marche.
Donc, pour les gens qui ne portent que des pantalons, pas du tout le genre de robe qu'on veut avoir quand on porte une culotte fugueuse.
Quoi qu'il en soit, malgré cette dose de stress supplémentaire, c'était quand même une sacrément bonne journée.Et contrairement à d’habitude, où je balance négligemment mes vêtements dans le panier à linge sale, j'ai pensé à... jeter la culotte. RIP, sous-vêtement un peu déluré parti trop tôt après de bons et loyaux services. On ne m'aura pas deux fois[2]!
(Je suis au courant qu'on ne devrait pas raconter des choses pareilles, encore moins à mon âge, mais je m'en fous, j'ai tellement ri que je m'en serais voulue de ne pas vous faire partager cette hilarité.)
mardi 16 septembre 2025
Le métier de porteur n'existe plus vraiment. A part peut-être les sherpas, bien sûr, mais ils sont, rapportés à la somme globale des porteurs d'autrefois, fort peu nombreux. Et tant mieux : si on trouve comment faire porter des charges lourdes par d'autres que des humains (et des animaux, tant qu'à faire), c'est toujours ça de pris. Enfin ça dépend à quel prix et ce qu'on entend déplacer mais ça n'est pas l'objet de ce billet.
Curieusement, le métier de livreur, lui, est en pleine explosion, rapport au commerce en ligne, notamment, mais a aussi changé de nature.
(Disclaimer, j'ai une immense compassion pour les livreurs et livreuses qui font un travail ingrat dans des conditions et cadences difficiles. C'est, globalement, un métier qu'on fait parce qu'on ne peut pas en faire un autre, moins fatigant, plus gratifiant. Et vraiment, je leur suis reconnaissante).
Avant, un livreur, de même qu'une livreuse, prenaient en charge un paquet à un point A pour l'emporter à un point B. On estimait leur travail accompli quand le colis était au point B, aux bons soins de son destinataire, et la messe était à peu près dite.
De nos jours, le rôle du livreur se rapproche plutôt du promeneur de chiens. Il prend bien en charge un colis et le promène, de son point de départ (A) aux alentours de son point de livraison (B). Attention, il y a un piège, on parle bien des alentours, pas du point B lui-même.
Une fois aux alentours, une nouvelle étape intervient, au cours de laquelle ils peuvent :
- décider que le point B n'existe que dans une réalité alternative et repartir promener votre colis, ailleurs.
- jouer. Indiquer que l'endroit était inaccessible, que vous n'étiez pas là, que si ce n'est lui, c'est donc son frère et autres prétextes plus ou moins heureux. Il "avise" et nous voilà en immersion dans l'enfer des emails automatisés qui racontent à peu près tout sauf ce qui s'est passé et comment vous allez récupérer votre colis.
- ne pas exister. Littéralement. Un transporteur néerlandais très connu a, par exemple, décrété que personne ne viendrait jamais dans mon quartier. L'expéditeur lui confie donc un colis qui arrive au centre de Saint-Ouen, y passe quelques jours sous des prétextes fallacieux tels que "contrôles de sécurité supplémentaires" (ça veut dire : même pas en rêve j'envoie mon camion chez toi) puis le retourne à l'expéditeur.
- vous demander de descendre chercher votre colis, quelle que soit sa taille, quel que soit son poids. J'en ai eu un la semaine dernière qui m'a livré dix kilos de croquettes et en me voyant sortir de l'ascenseur, m'a proposé de me le monter. Lol.
- le confier à un quidam plus ou moins de confiance. Puis assurer mordicus qu'il l'a remis en main propre. Juste : pas à vous.
- tenter de le faire rentrer dans votre boîte aux lettres. Quoi qu'il en coûte. Alors que vous l'attendez, porte ouverte et dignité couverte à la hâte, quelques étages plus haut.
C'est uniquement la conscience de la pression subie, de la précarisation de ce métier, aussi grande que sa pénibilité, qui m'empêche de demander un moratoire pour le renommer en "promeneur(se) de colis".