jeudi 29 janvier 2015

Ca c'est privé !

Depuis quelques jours, je lis avidement le brouillon du futur livre de Tristan Nitot sur le sujet du contrôle des données récoltées sur internet, via les terminaux classiques ou les objets connectés.

C'est vertigineux. On SAIT les choses, on SAIT que des données sont collectées. Mais la mise en perspective de ce qui en est déjà fait, de ce qui pourrait en être fait, c'est une grosse claque.

Jusqu'ici je me disais : avant que quelqu'un ne s'attaque à chercher, personne par personne, à tout savoir... (encore que, j'aurais mieux fait de fermer mon neurone, sur ce coup...).

Mais même traitées en masse, nos données peuvent être exploitées à des fins avec lesquelles nous ne sommes pas "confort", comme dirait un ex boss que j'aime bien.

Dans le meilleur des cas.

Du coup j'ai passé un peu de temps sur les pages de Mozilla sur le respect de la vie privée.

Et j'ai partagé, notamment avec ma cheffe et l'équipe webmarketing. Parce qu'il me semble que nos besoins de données en prospection sont assez limités, que même, on nous filerait tout un paquet de données qu'on ne saurait pas bien quoi en faire, et que du coup, la question de : que sont les données dont nous avons vraiment besoin, comment devons-nous les obtenir, le plus éthiquement possible, et les exploiter, doit être au cœur de nos démarches.

Autant vous dire qu'arriver dans une réunion de marketteurs avec des idées pareilles sous le bras, c'est encore plus bizarre que d'arriver déguisé en poussin géant, hein.

Et bien ma cheffe bien aimée a accepté l'idée qu'on en parle et débatte et pourquoi pas qu'on se fixe une sorte de "charte", nous, nos partenaires, sur le sujet. A suivre, donc.

Suis pas peu fière (même si je sais que dans les faits, hein... Mais il faut bien commencer quelque part).

mercredi 21 janvier 2015

Pomme d'amour

J'ai un bébé pomme d'amour, ses joues rebondies, rouges et tièdes lui font une tête de joli clown.

J'ai un bébé farceur, qui se retourne sur le ventre MAIS avec un bras coincé en dessous et râle parce que bon, quand même, faudrait voir à pas trop se fatiguer à appuyer sur son bras pour se dégager.

J'ai un bébé omnivore, qui a envie de tout goûter et vient d'entamer une très probablement longue histoire d'amour avec des croûtons de pain.

J'ai un bébé enchanteur, qui sourit tant et tellement quand il nous voit, chacun d'entre nous de son petit monde, papa, maman, frère et soeur, et qui sourit aussi au reste du monde. Il fait des têtes de charmeur, des têtes de farceur, j'ai un bébé irrésistible.

J'ai un bébé sauveur, il suffit de passer un peu de temps avec lui pour réapprendre le sourire, pour oublier un peu le fracas du monde qui tombe en pièce.

Alors je parle de lui parce que ça fait plus de bien que de parler du monde, là tout de suite.

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vendredi 9 janvier 2015

Je suis Frédéric

Tout le monde a été frappé, mercredi midi, par l'impensable.

Mercredi soir, dans l'immense boîte pour laquelle je travaille, nous avons appris que l'un d'entre nous faisait partie de la liste des tués.

Frédéric Boisseau était bien moins connu qu'un certain nombre des victimes de l'attentat. Il n'était ni journaliste, ni dessinateur.

Pour autant, à sa façon, il contribuait, comme les autres, à rendre la vie meilleure. Les uns par le rire, par la dénonciation. Lui par ses gestes quotidiens.

Il faisait partie de ces gens qui, peut-être dans votre entreprise, fourmillent pour vous simplifier la vie, la rendre plus agréable. Remplir les machines à café, réparer ce qui est cassé, changer des néons ou des stores cassés, nettoyer, faire la plonge.... autant de métiers de l'ombre dont on se rend compte de l'importance quand ils sont mal assurés.

Je ne connaissais pas Frédéric, je ne sais pas s'il était petit ou grand, ou blond ou brun ou à carreaux. Je ne connaissais pas le son de sa voix, la couleur de ses yeux, je ne sais pas s'il avait le sens de l'humour, s'il était gourmand ou fan de foot.

Mais je sais que lui comme moi avons été, chaque jour, guidés par les mêmes valeurs d'entreprise : esprit de service, esprit d'équipe, esprit de progrès. Respect de toutes les formes de diversité. Éthique.

Mercredi midi c'était citoyen, humain, émotionnel. Depuis mercredi soir ça touche au perso, un peu irrationnellement, mais très nettement. Cette culture d'entreprise qui nous rassemble tous, cette envie de faire du bon boulot, ce soucis de contribuer, par chacun de nos gestes quotidien, à améliorer celui de ceux pour qui nous travaillons, font partie des "guides" de tous les employés, partout dans le monde, dans nos métiers si différents, dans des pays si éloignés. Et pourtant le même fil rouge.

Depuis mercredi soir, je pleure des grands messieurs dont le travail, très visible et exposé, incarne une forme de liberté. Et je pleure Frédéric, je pense à sa femme, à ses enfants, à sa famille, qui ne pourront jamais accepter que ce jour-là, simplement en partant faire son travail, leur mari et père, fils ou frère, ait perdu la vie.

Je voudrais, une peu vainement, un peu irrationnellement, que chacun ait le nom de Frédéric en tête en même temps que Cabu et Ahmed, Wolinski et Maris, et les autres. Je voudrais qu'il soit au cœur de tous les hommages. Dans le cœur des gens. Sa vie ne valait pas moins.

Depuis mercredi soir, je suis Frédéric.

mercredi 7 janvier 2015

Sidération

On commence une journée, on a pas forcément tout à fait assez dormi, on commence comme tous les jours à peu près, on ne sait pas encore.

On travaille, on parle, on respire, on vit.

Et soudain, chacun dans une circonstance dont on se souviendra toute notre vie, on apprend. L'impensable.

Depuis la mi-journée je suis en état de sidération.

Je ne comprends pas, ça dépasse mon entendement. Comment peut-on viser la tête de gentil Duduche coiffé comme Mireille Mathieu de Cabu et tirer ? La bille de clown de Wolinski, la tête à la Jerry Lewis de Bernard Maris, la tronche d'éternel pré ado de Charb, la tignasse de Tignous ? Leur. Tirer. Délibérément. Dessus. Et les autres. Comme il dépassait mon entendement qu'on vise un enfant et qu'on tire, à Toulouse, il y a peu...

L'horreur dépasse mon entendement. Oui, ça frappe plus fort quand c'est plus près de chez nous, oui, on pense sans doute encore que tout ça, c'est chez les autres.

Pour autant ai-je le droit de dire que "Je suis Charlie" ? D'abord parce que souvent ils m'ont fait hurler de colère, aussi souvent qu'ils m'ont fait rire, sans doute. Surtout parce que je ne suis pas exposée. Je soutiens des idées, j'agis pour le mieux que je crois possible dans mon petit monde, mais je n'ai jamais posé la cible sur mon dos, je n'ai pas vécu des années avec la possibilité tangible qu'on me tue pour mes idées. Pire encore, pour quelques mots, pour des dessins.

Il faut croire que les terroristes sont bien faibles : faire taire les idées autres par la terreur et avoir besoin de tuer à cause de la menace d'un trait de crayon, c'est finalement avoir bien peu confiance dans ses croyances, non ? Faibles, ils sont, mais il font mal. Très mal.

Alors pour surmonter cette sidération, je me laisse émouvoir. Pleurer à entendre les larmes de ce type que je n'estime vraiment pas, Val. S'émouvoir de manifestations venues de la terre entière.

Frissonner à un américain qui choisit notre langue pour affirmer son soutien.

Constater que nous sommes, malgré tout, les plus nombreux, à trouver qu'il ne faut pas, pour citer Val, laisser le silence s'installer, qu'il ne faut pas laisser la peur décider de nos libertés.

Et me réchauffer aux cris joyeux de mon fils, prendre des nouvelles de ma fille au bout du monde. Savoir qu'on fait tout pour leur donner comme arme les mots, les idées, plutôt que la terreur.

Je ne suis pas Charlie mais je pense à ceux qui sont morts, à leurs familles, leurs amis. Et je souhaite de tout mon coeur que nous tous, un plus un plus un plus un plus un, nous fassions que ça ne soit pas vain, ces assassinats incompréhensibles. Malgré tout cette pensée en fond : rien n'a de sens. Il n'y a plus que de la colère et ce qu'on décide d'en faire.

Voeux et marketing de masse

Je dois avoir une solide déformation professionnelle, parce que ça ne me gênait pas tant que ça "avant", mais depuis quelques années, ça me saute aux yeux.

Ça ?

La formulation des voeux.

Je n'ai évidemment aucun problème avec le fait qu'on me souhaite bonne année, et même "surtout la santé, parce que quand la santé va, tout va". Je n'ai aucun problème non plus avec le fait de souhaiter du bonheur à un maximum de gens.

Mais.

Autant les vœux formulés de façon personnelle, vraiment personnelle, envoyés un par un font chaud au coeur, évidemment.

Autant les vœux envoyés en masse, sont agréables à recevoir.

Autant les vœux "faussement personnalisés", ça m'agace un peu (même si je suis toujours contente qu'on me souhaite du bon, bien sûr).

Parce que figurez-vous que "Bonne année et du bonheur pour toi et tes proches", ça se voit comme le nez au milieu de la figure que c'est "faussement personnalisé". Et ça me dit "je cherche à te faire croire que je t'ai envoyé un truc spécial pour toi [1].

Du coup, et ça n'engage que moi, je crois que je "préfère encore" qu'on assume de dire : j'ai eu envie de souhaiter bonne année à tout le monde et c'est un petit peu long de faire du personnalisé alors j'envoie un "Bonne année" tout simple. Ou bien qu'on ne me souhaite pas forcément bonne année, si c'est trop de boulot :-D

Quoi qu'il en soit, je me rends bien compte que c'est ma névrose du ciblage et de l'adaptation des messages par cible qui parle et je remercie tous les gens qui nous ont adressé leurs vœux !

Et je vous souhaite, à tous également, une très belle année 2015.

Note

[1] et non "pour toi Public :-p